ALAIN-FOURNIER [Henri Alban Fournier] 1886-1914
ALAIN-FOURNIER
[Henri Alban Fournier]
1886-1914
Romancier, né à La Chapelle-d’Angillon, Cher. Une enfance passée dans la nature (Berry, Sologne) et une adolescence assez décevante : marquée par l’influence de sa mélancolique et rêveuse sœur, puis par un échec à Normale, enfin par un bref amour pour une jeune fille qu’il ne pouvait épouser. Tous ces épisodes seront transposés (ou plutôt transfigurés, à l’exemple du prétendu livre de souvenirs que Charles Nodier intitula Le Pays du rêve) dans son unique roman, Le Grand Meaulnes. Par ce livre qui paraît à la veille de sa mort, en 1913, Alain-Fournier s’efforce de faire surgir (ainsi qu’il l’écrit au confident de toute sa vie, Jacques Rivière) tout ce paradis imaginaire qui fut le monde de mon enfance. Au surplus, cette Correspondance avec Jacques Rivière (qui épousera la romantique sœur d’Alain-Fournier, Isabelle) est un commentaire idéal au Grand Meaulnes ; et par exemple ceci : Le héros de mon livre est un homme dont l’enfance fut trop belle. En effet, la première adolescence y est exaltée comme l’âge d’or de l’homme avant la faute. Augustin Meaulnes, une fois parvenu à l’adolescence proprement dite, en vue de l’âge d’homme, sait déjà que ce paradis ne peut plus être : il a renoncé au bonheur (lettre du 4 avril 1910). Alain-Fournier sera, dès les premiers mois de la guerre, « porté disparu à l’ennemi », près de Verdun.
■ Œuvres - En poche : Le Grand Meaulnes (Le Livre de Poche/ Classique).
Alain-Fournier (1886-1914) pseudonyme d’Henri Alban Fournier. Né le 30 octobre 1886, à La Chapelle d’Angillon (Cher), de parents instituteurs, il vit pendant douze ans à la campagne. Années décisives, où se fixent en lui les «paysages de son âme». De 1891 à 1898, son enfance se passe à Épineuil-le-Fleuriel, aux côtés de sa sœur Isabelle, née en 1889, dans la petite école où tout devient prétexte au rêve. En octobre 1898, il entre en sixième au lycée Voltaire, à Paris. Il habite chez une amie de sa grand-mère et sera pensionnaire à la rentrée de 1900. En 1901, ayant sauté la troisième, il est en « seconde marine » au lycée de Brest pour y préparer l’École navale, expérience difficile, qu’il supporte mal. Pendant les vacances de Noël 1902, il décide de ne plus retourner à Brest. Il est pendant un mois pensionnaire au lycée Henri-IV à Paris, puis il suit la classe de philosophie au lycée de Bourges. Bachelier, il s’inscrit en khâgne au lycée Lakanal de Sceaux en octobre 1903. Il y rencontre Jacques Rivière, son condisciple, qui devient son confident. Ils découvrent Pelléas et Mélisande et le Prélude à l’après-midi d’un faune en janvier 1904, font la connaissance du peintre Maurice Denis. Leur correspondance retrace fidèlement leurs exaltations et leurs ambitions partagées. Le 1er juin 1905 se produit dans la vie d’Alain-Fournier un événement qui marquera sa vie et son œuvre : il rencontre à Paris, devant le Grand-Palais, une jeune fille dont la beauté l’éblouit et à laquelle il ne cesse de penser. Le dimanche de Pentecôte suivant, le 11 juin, il la revoit et lui parle : « A quoi bon ? » lui dit-elle. L’été de 1905, il est en Angleterre, près de Londres, pour un stage de traducteur, découvre la poésie et le roman anglais, en particulier Keats, Kipling et le Dickens de David Copperfield, visite la National et la Tate Gallery, écoute du Wagner à Queen’s Hall. Il envoie à Rivière plusieurs poèmes qu’il tente de publier et rentre habité de projets. Mais il lui, faut d’abord préparer le concours de l’École normale pendant l’année scolaire 1905-1906. Après son échec, il redouble au lycée Louis-le-Grand, en 1906-1907. Admissible, il échoue à l’oral et apprend, le lendemain, qu’Yvonne de Quièvrecourt, « la Demoiselle » du Cours la Reine, « est mariée depuis cet hiver ». Du 2 octobre 1907 au 25 septembre 1909, il accomplit son service militaire, pendant lequel paraît un premier texte signé Alain-Fournier : « Le Corps de la femme » (La Grande Revue, 25 décembre 1907). Sa sœur Isabelle a épousé Jacques Rivière le 24 août 1909 : il dit à sa mère se sentir « affreusement seul et sans nouvelles de personne ». Après de grandes manœuvres dans la région de Mirande, où il a rejoint comme sous-lieutenant le 88e R.I., il apprend qu’Yvonne de Quièvrecourt est devenue mère. En 1910, Occident publie un de ses poèmes en prose, « L’Amour cherche les lieux abandonnés ». Début février, il amorce avec une certaine Valentine une liaison houleuse, qui durera deux ans. Le 9 mai 1910, il commence une collaboration régulière à Paris-Journal, où il publiera jusqu’au 10 avril 1912. Depuis juillet 1907, Alain-Fournier rêve d’un livre qu’il laisse mûrir en lui, au hasard de ses rencontres, de ses réflexions et de ses lectures jusqu’à décembre 1912. Il ordonne lentement, par rapport à la rencontre merveilleuse de 1905, les thèmes qui l’habitent depuis l’enfance : odeurs, saveurs, couleurs, vie à l’école, maison protectrice, besoin d’aventure, initiation au romanesque et à l’étrange, extase et désenchantement, recherche et peur d’un bonheur «qui n’est pas de ce monde ». Le 4 avril 1910, au cœur de la genèse du roman dont le titre prévu est Le Jour des noces, il confie à Rivière : « Meaulnes, le grand Meaulnes, le héros de mon livre, est un homme dont l’enfance fut trop belle [...]. Par instants, il semble que tout ce paradis imaginaire qui fut le monde de son enfance va surgir au bout de son aventure, ou se lever sur un de ses gestes. [...] Mais il sait déjà que ce paradis ne peut plus être. Il a renoncé au bonheur. Il est dans le monde comme quelqu’un qui va s’en aller. » En mai 1912, présenté par Péguy, Alain-Fournier devient le secrétaire de Claude Casimir-Perier, qui veut consacrer un livre à Brest port transatlantique. Il fait alors la connaissance de l’épouse de Claude, l’actrice Mme Simone, née Pauline Benda, dont il devient l’amant un an plus tard, après avoir revu, à Rochefort, pour la dernière fois, Yvonne de Quièvrecourt, mère de deux enfants. Le Grand Meaulnes, publié d’abord en cinq livraisons de la NRF, paraît en volume chez Émile-Paul en octobre 1913 et manque de peu le prix Goncourt. Au début de l’année 1914, Alain-Fournier travaille à un autre roman, Colombe Blanchet (édition des plans et brouillons, Le Cherche-Midi, 1990) et à une pièce de théâtre, La Maison dans la forêt, sous l’influence de Simone. La déclaration de guerre le surprend à Cambo, chez les Perier. Il rejoint Mirande le 1er août, est promu lieutenant le 2, et son régiment, embarqué le 12, entre dans la bataille le 1er septembre. Il disparaît le 22, quinze jours après Péguy.
En 1924, Jacques et Isabelle Rivière publieront des textes inédits d’Alain-Fournier, sous le titre Miracles.
[Henri-Alain Fournier] Romancier, né à La Chapelle-d’Angillon, Cher. Une enfance passée dans la nature (Berry, Sologne) et une adolescence assez décevante : marquée par l’influence de sa mélancolique et rêveuse sœur, puis par un échec à Normale, enfin par un bref amour pour une jeune fille qu’il ne pouvait épouser. Tous ces épisodes seront transposés (ou plutôt transfigurés, à l’exemple du prétendu livre de souvenirs que Charles Nodier intitula « le pays du rêve ») dans son unique roman, le Grand Meaulnes. Par ce livre qui paraît à la veille de sa mort, en 1913, Alain-Fournier s’efforce de faire surgir (ainsi qu’il l’écrit au confident de toute sa vie, Jacques Rivière) tout ce paradis imaginaire qui fut le monde de mon enfance. Au surplus, cette Correspondance avec Jacques Rivière (qui épousera la romantique sœur d’Alain-Fournier, Isabelle) est un commentaire idéal au Grand Meaulnes; et, par exemple ceci : le héros de mon livre est un homme dont l’enfance fut trop belle. En effet, la première adolescence y est exaltée comme l’âge d’or de l’homme avant la faute. Plus qu’un refuge contre l'avenir, le souvenir est un refus. C’est le dos résolument tourné à la réalité de la vie. Augustin Meaulnes, une fois parvenu à l’adolescence proprement dite, en vue de l’âge d’homme, sait déjà que ce paradis ne peut plus être : il a renoncé au bonheur (Lettre du 4 avril 1910). Alain-Fournier sera, dès les premiers mois de la guerre, « porté disparu à l’ennemi », près de Verdun.
Œuvres Le Grand Meaulnes (Livre de poche). Critique M. Guiomar, Inconscient et Imaginaire dans le « Grand Meaulnes » (Corti, 1964). - J. Rivière, Correspondance avec A.-Fournier, 2 vol. (Gallimard). - Isabelle Rivière, Vie et Passions d'A.-Fournier (Albin-Michel, 1967). - J. Loize, A.-Fournier (Hachette, 1969).