Albert-Birot Pierre
Albert-Birot Pierre (1876-1967). Né le 22 avril 1876 à Angoulême, il y passe l’essentiel de son enfance. Il vit alors les déboires financiers, puis le départ de son père, et les difficultés rencontrées ensuite par sa mère. A Paris, aux Beaux-Arts, il étudie la peinture et la sculpture et produit des toiles cubistes et abstraites. Il suit également des cours en Sorbonne et au Collège de France. Pendant plusieurs années, il travaille comme restaurateur pour un grand antiquaire parisien. Réformé lors de la Première Guerre mondiale, il fonde en 1916 la revue SIC dont le premier numéro sort en janvier, et qui paraîtra jusqu’en 1919. L’orientation est moderniste et avant-gardiste. Le titre de la revue (le mot oui en latin) dit le désir d’une « affirmation en réaction contre tout négatif ». Il correspond aussi à l’initiale de trois mots importants aux yeux d’Albert-Birot : son, idée, couleur. Apollinaire collabore au quatrième numéro. La revue publie ensuite Drieu La Rochelle, Reverdy, Soupault, Tzara, Aragon, Breton, Radiguet. Une École Nunique est fondée en vue de renouveler radicalement l’art. Entre autres manifestations, SIC organise la représentation des Mamelles de Tirésias le 24 juin 1917. Jamais, toutefois, Pierre Albert-Birot ne renoncera à son indépendance à l’égard des différentes écoles et doctrines de l’époque. Après la guerre, il se consacre davantage à la littérature dans un esprit antiréaliste (poésie, prose, théâtre, traductions), imprimant lui-même ses livres. Entre 1918 et 1924, il publie une pièce pour marionnettes, des drames burlesques (Le Bondieu, SIC, 1922 ; Les Femmes pliantes, SIC, 1923). S’y ajoutent des scénarios pour le cinéma. A partir de 1921, il développe la geste de Grabinoulor (Le Premier Livre de Grabinoulor, SIC, 1921 ; Grabinoulor, épopée, livres I et II, Denoël, 1933 ; Grabinoulor-amour, Rougerie, 1955 ; livres I, II, III, Gallimard, 1964, Éditions de la revue Strophes, 1965, Rougerie, 1968). Il y abandonne la ponctuation et la disposition typographique classique, laissant le texte fluer avec autant de liberté qu’il en accorde à son héros voyageur. Grabinoulor connaît ainsi un voyage extraordinaire, dont la fantaisie peut faire penser aux explorations lunaires et solaires de Cyrano de Bergerac, assorties de la verve de Rabelais et de l’invention subtile de Joyce. En 1934, Rémy Floche, employé (Denoël) évoque la vie quotidienne. Les poèmes d’Albert-Birot sont marqués par l’attachement jubilatoire au sensible. C’est ce que souligne Apollinaire dans sa préface aux 31 poèmes de poche (SIC, 1917). Écrire est joie de saisir le concret, ce qui autorise des jeux de langage ou de typographie dont la visée n’est pas une mise en question ou une destruction du langage. Toutes sortes d’inventions se trouvent dans l’œuvre, par exemple dans le Poème à crier et à danser de La Lune ou le livre des poèmes (Éditions Jean Budry, 1924). La Joie des sept couleurs (SIC, 1919) réaffirme ce désir de participer à la vitalité dionysiaque du monde. Les Amusements naturels (Denoël, 1945) font aussi de cette participation lyrique une possession heureuse (Paris de mai). Le poète ne fait pas pour autant de la poésie un divertissement et l’oubli de la mort. Elle est plutôt, comme l’annonçait déjà le titre de SIC, l’assentiment qui fait du zéro la forme même d’une circularité pleine : « Lâchez tout oui oui oui et l’on est cet aimable sphérique amoureux d’infini [...] / Oui est ovale oui oui oui et la joie aussi est ovale ovale ovalité / Oui oui oui oui oui et mort aussi est ovale aimable ovalité du néant » (Dix poèmes à la mer, V). A côté de ces textes amples, certains adoptent une forme plus mesurée, plus resserrée (Cent dix gouttes de poésie, Seghers, 1952 ; Cent nouvelles gouttes de poésie, Pujols, Yves Filhol éditeur, 1967 ; Graines, poèmes-missives, Éditions du Club du poème, 1965). Pierre Albert-Birot est mort à Paris le 25 juillet 1967.
Liens utiles
- « Du bon usage de la lenteur » Pierre Sansot Éd. Rivage poche/Petite Bibliothèque (commentaire de texte)
- AGATHONPHILE OU LES MARTYRS SICILIENS de JEAN-PIERRE CAMUS
- Albert Camus - La Peste (II. Chapitre I.)
- Le Livre de ma mère / Albert Cohen. – Gallimard.
- Pierre CORNEILLE (1606-1684), Rodogune , princesse des Parthes (1644) : Acte V, scène 1 : monologue de Cléopâtre