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ARLAND Marcel 1899-1986

ARLAND Marcel 1899-1986
Romancier et nouvelliste, né à Varennes, dans la Haute-Marne. Attiré, un instant, par l’esprit contestataire de la littérature d’avant-garde - et tout particulièrement, du surréalisme -, il en dénonça les excès et les limites, dès 1924, dans l’essai mémorable qu’il intitulait Un nouveau mal du siècle. Sa voie véritable, il la trouvera dans un art raffiné, tout de rétractilité, ou mieux : de violence sourde qui fait merveille dans le récit bref : Les Vivants (1934), Il faut de tout pour faire un monde (1947), À perdre haleine (1960), La Musique des anges (1967), Attendez l’aube (1970). Ainsi le héros du Témoin (dans Les Plus Beaux de nos Jours, 1937) regarde au bord de la plage, tout en nageant, ses deux amis restés assis sur le sable, un jeune couple ; et il se sent si comblé par leur bonheur que soudain, le temps d’une très courte folie, il lui semble qu’il va se laisser engloutir dans les vagues.
Les romans Antarès (1932), Terre natale (1938) et Zélie dans le désert (1945), ainsi que La Consolation du voyageur (1952), essai qui se double d’une confidence - elles sont rares chez cet écrivain -, s’ajoutent aux réussites subtiles, secrètes mais parfaites, du nouvelliste Marcel Arland.
Œuvres - En poche : Terre natale (Folio). - Zélie dans le désert (id.). - La Consolation du voyageur (id.). - Lettres de France (Bibl. Albin Michel). - Autres: Les Plus Beaux de nos Jours (Gallimard). - À perdre haleine (id.). - La Prose française. Anthologie, histoire et critique d'un art (Stock, 1951).

Arland Marcel (1899-1986). Né le 5 juillet 1899 à Varennes-sur-Armance (Haute-Marne), brillant élève, il se prépare très tôt à un « sacerdoce littéraire ». Étudiant à la Sorbonne, il entre en contact avec le milieu des écrivains, en tant que critique pour une revue universitaire, puis comme cofondateur, avec Vitrac, Crevel, Dhôtel, de la revue Aventure, liée au mouvement surréaliste dont elle s’éloigne rapidement. Jusqu’en 1929, Arland enseigne les lettres tout en écrivant. Après Terres étrangères (1923), La Route obscure (1924), Étapes (1927), il est remarqué par Gide et Larbaud et se lie avec le jeune Malraux. Dès ces premières œuvres apparaît un thème qu’exprime le titre d’un essai de 1929, Sur un nouveau mal du siècle. Cet essai qui situe la littérature dans le champ de l’éthique connaît un grand succès, confirmé par celui du roman qui l’illustre, L’Ordre (1929, prix Goncourt). Arland, dès lors, vit de sa plume.

On peut s’étonner aujourd’hui de l’accueil réservé à L’Ordre dont le didactisme semble lourd, surtout comparé à la finesse qui caractérise la production ultérieure d’Arland. Ce long roman en trois tomes met en scène Gilbert Villars, jeune homme rêveur et brillant, révolté contre l’ordre bourgeois qu’incarnent son oncle et tuteur et son frère Justin, jeune médecin et homme politique plein d’avenir. Le héros aime sa cousine Renée qui lui rend son amour mais épouse Justin. Gilbert coupe alors tout lien avec sa famille, s’enfuit à Paris, vit dans la misère, devient communiste et se fait un nom comme journaliste et polémiste. Il renoue avec Renée qui abandonne Justin pour lui quand il tombe malade. Leur idylle dure peu de temps : le couple vit dans la pauvreté ; Gilbert doit enseigner et se détache de Renée qui lui rappelle la médiocrité de sa destinée. A la suite d’une altercation sordide avec une maîtresse de Gilbert, Renée est recueillie par Justin, tandis que Gilbert part pour l’Orient. Malade, il revient mourir à Clermont, se réconciliant in extremis avec Renée et Justin. En 1930, Arland épouse une jeune femme peintre, qui apparaîtra souvent en filigrane dans son œuvre. Il fait paraître de brefs récits, genre où son talent s’exprime le mieux, recueillis dans Antarès (1932), Les Vivants (1934), Les Plus Beaux de nos jours ( 1937), La Grâce (1941). Ces petites études de mœurs et de caractères ont souvent pour décor sa Champagne natale. Pendant la guerre et jusqu’au début des années cinquante, Arland se consacre surtout à son activité de critique, publiant une Anthologie de la poésie française (1941, complétée en 1951 par La Prose française, anthologie et histoire d’un art) et un très grand nombre d’articles (recueillis en 1952 dans Essais et nouveaux essais critiques). A côté des études sur divers écrivains de sa génération littéraire, qui offrent un état des lieux de la littérature en France à la Libération, il compose des essais plus ambitieux comme « Littérature et politique », « La poésie pure » et « Sur l’art du roman ». Ces études sont prolongées par un Marivaux (1950), des Lettres de France (1951) et La Grâce d’écrire (1955). La critique n’est pas pour Arland une activité de deuxième ordre ; aussi ne s’étonne-t-on pas de le voir entrer à la NRF en 1953, comme adjoint de Paulhan, puis en assurer la direction de 1968 à 1977. Il est désormais au sommet de son influence et de son talent. Paraissent alors ce qu’il nomme ses « essais intimes » (La Consolation du voyageur, 1952 ; La Nuit et les sources, 1963) et surtout un recueil de lettres fictives — mais le sont-elles toutes ? — Je vous écris ( 1960) : adressées à Mme de Sévigné, à Jean Grosjean, à Marcel Jouhandeau..., elles parlent de la nature, de la littérature, de la « grâce d’écrire », tandis qu’une lettre à Jean Paulhan propose, trente ans plus tard, une relecture du personnage de Gilbert Villars, le héros de L’Ordre. Le meilleur d’Arland est peut-être dans ses derniers recueils de nouvelles, ou plutôt ses livres car les nouvelles y sont étroitement intégrées les unes aux autres par un subtil système de rappels thématiques ou narratifs. Ces œuvres forment un ensemble au style sobre, dominé par l’omniprésente conscience de la mort et par une obsédante opposition entre ténèbres et clarté : L’Eau et le feu (1956), A perdre haleine ( 1960), Le Grand Pardon (1965), Attendez l’aube (1970). En 1968, Marcel Arland est élu à l’Académie française ; il suffit d’évoquer les titres de ses derniers ouvrages pour deviner la pensée qui l’habite désormais : Proche du silence (1973), Avons-nous vécu ? (1977), Ce fut ainsi (1979), Mais enfin qui êtes-vous ? (1981), Lumière du soir ( 1983).

Romancier et nouvelliste, né à Varennes, dans la Haute-Marne. Attiré, un instant, par l’esprit contestataire de la littérature d’avant-garde - et tout particulièrement, du surréalisme -, il en dénonça les excès et la vanité, dès 1924, dans l’essai mémorable qu’il intitulait Un nouveau mal du siècle. Sa voie véritable, il la trouvera dans un art raffiné, tout de rétractilité, ou mieux : de violence sourde, contenue, qui fait merveille dans le récit bref : les Vivants (1934), Il faut de tout pour faire un monde (1947), A perdre haleine (1960), la Musique des Anges (1967), Attendez l'aube (1970). Ainsi le héros du Témoin (dans les Plus beaux de nos Jours, 1937) regarde au bord de la plage, tout en nageant, ses deux amis restés assis sur le sable, un jeune couple; et il se sent si comblé par leur bonheur que soudain, le temps d’une très courte folie, il lui semble qu’il va se laisser engloutir dans les vagues. Les romans Antarès (1932), Terre natale (1938) et Zélie dans le désert (1945), ainsi que la Consolation du Voyageur (1952), essai qui se double d’une confidence - elles sont rares chez cet écrivain -, s’ajoutent aux réussites subtiles, secrètes mais parfaites, du nouvelliste Marcel Arland. Œuvres Antarès (Livre de poche). - Terre natale (Livre de poche). - Les Plus beaux de nos Jours (Gallimard). - A perdre haleine (Gallimard). - La Prose française, anthologie, histoire et critique d'un art (Stock, 1951). Critique Y. Berger, Arland nouvelliste (dans revue Critique, avril 1961). - J. Duvignaud, Arland (Gallimard, 1962).

ARLAND Marcel.

Varennes-sur-Amance 5.7.1899 - Brinville 12.1.1986. Issu d’une famille de petite bourgeoisie rurale, il n’a que trois ans lorsque meurt son père et il sera élevé par une mère au tempérament nerveux et instable, mais aussi auprès de grands-parents dont il garde un souvenir attendri. Son œuvre, marquée par un amour profond de la campagne et des êtres qui y vivent, évoquera souvent les figures familières de son enfance. Après une scolarité brillante au collège de Langres, il poursuit à Paris des études de lettres et collabore à un périodique intitulé l’Université de Paris; il se laisse momentanément séduire par le dadaïsme, puis par le surréalisme, mais, surtout soucieux de se retrouver soi-même, il rejette les «pétarades littéraires », les doctrines et l’engagement politique. Pour lui, la littérature est une religion, «une sorte de salut» qui doit avoir « une valeur éthique autant qu’esthétique». Son premier livre, Terres étrangères (1923), retient l’attention de Gide et de V. Larbaud par son art pathétique et dépouillé, son style parfaitement maîtrisé. La Nouvelle Revue française, que dirige Jacques Rivière, publie son étude sur les jeunes tendances littéraires, Sur un nouveau mal du siècle, et il collaborera désormais régulièrement à la N.R.F., dont il deviendra codirecteur avec J. Paulhan, en 1953. Alors qu’il est encore professeur, de lettres dans un collège libre de Jouy-en-Josas (il y restera jusqu’en 1929), il publie plusieurs récits, où s’exprime un art discret au service d’une exploration minutieuse du « monde intérieur ». La conscience lucide de cette fonction de l’écrivain selon A. inspire des essais où il s’interroge sur sa vocation et le sens de son expérience littéraire. En 1929, A. accède à la notoriété avec l’attribution du prix Goncourt à son roman, l’Ordre, dont le héros, Gilbert, esprit inquiet et révolté, au nihilisme
destructeur, a la « vocation du malheur ». Les Carnets de Gilbert, partiellement écrits à la même époque et publiés en 1931, sont un dialogue entre le romancier et son personnage et soulignent la pensée profonde d’A., qui voit, dans « le désir d’être en paix, le goût du néant », le secret moteur de nos actions. Dans les années suivantes, l’écrivain, sans renoncer entièrement au roman, s’oriente surtout vers la nouvelle et tend à « créer un monde plus humain, où le trouble lui-même trouve une sorte d’harmonie ; moins violent d’apparence, pas plus apaisé, mais d’un frémissement plus intime». Terre natale est ainsi une confession pudique et discrète qui évoque les souvenirs du passé et tente de comprendre les êtres chers dans leur réalité profonde. Mobilisé en 1939, rendu à la vie civile l’année suivante, A. refuse de s’associer avec Drieu la Rochelle qui, après l’armistice, a accepté la direction de la Nouvelle Revue française. Il écrit pour divers journaux et périodiques et publie une importante et caractéristique Anthologie de la poésie française ainsi que divers essais. Le thème de l’enfance - qui est une des obsessions de l’écrivain - domine le récit Zélie dans le désert, pitoyable tragédie d’un personnage qui n’est pas sans évoquer la Mouchette de Bernanos. Au lendemain de la guerre, c’est, au-delà même de la méthode critique d’analyse des œuvres, la recherche des valeurs et d’une raison d’être de la littérature qui inspire avant tout un auteur devenu principalement essayiste et critique et l’un des analystes les plus lucides du malaise de l’époque. Mais cette analyse s’intègre à une vue plus globale de la problématique de la création littéraire, à travers ses aspects techniques (la Prose française: anthologie, histoire et critique d’un art, prose qu’il considère non comme « un instrument », mais comme « un être ») ou spirituels : ainsi la Grâce d'écrire, comme le dit clairement son titre, est, par le moyen d’une psychologie de la création, un véritable traité de « spiritualité » littéraire : « J’aime avant tout dans l’œuvre d’art... l’un des hauts modes où l’homme s’exprime, se délivre et trouve son harmonie, l’un des moyens les plus purs, peut-être, par où il tend à s’accomplir. » De même, après la Préface aux Œuvres de Valéry Larbaud, où le même thème est appliqué à ce cas particulier, Je vous écris est, sous la forme d’une correspondance imaginaire, une suite de méditations sur l’intimité même de l’expérience créatrice. A. accède alors à ce qu’il appelle la ...