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Bâ Amadou Hampaté (1901-1991)

Bâ Amadou Hampaté (1901-1991). Né à Bandiagara, dans l’ancienne capitale de l’empire Toucouleur du Macina (fondé par El Hadj Omar en 1862), celui qui proclamait : « En Afrique, chaque vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle », s’est attaché tout au long d’une carrière fertile en péripéties à sauver de l’oubli les trésors de la mémoire populaire de son pays, le Mali. Élevé par un chef de province que sa mère, veuve, avait épousé en secondes noces et chez qui se réunissaient tous les notables de la région, le jeune Amadou Hampaté Bâ a été nourri par une tradition orale encore bien vivante, dont il s’est fait le traducteur, l’interprète et le défenseur. Requis à l’âge de douze ans pour suivre les cours de l’école française, qu’on appelait encore à l’époque «école des otages», il n’en continue pas moins de fréquenter l’école coranique de Bandiagara, où il reçoit l’enseignement de Tiemo Bokar, son maître spirituel (il lui a rendu un fervent hommage dans son essai Tiemo Bokar, le sage de Bandiagara). Titulaire du certificat d’études primaires, il est admis à l’École normale de Gorée, mais sa mère s’opposant à son départ pour le Sénégal, il est muté d’office à Ouagadougou en qualité d’« écrivain auxiliaire temporaire ». Il y restera dix ans, de 1922 à 1931, avant d’occuper, à Bamako et à Dakar, différents postes de commis et d’interprète, autant d’observatoires d’une société coloniale dont il démonte malicieusement les rouages dans son unique roman, L’Étrange Destin de Wangrin (1973), truculente chronique des friponneries d’un interprète sans scrupules dans le Soudan des années 1914-1930. De ce personnage, la carrière mouvementée n’est pas sans présenter quelques ressemblances avec celle d’Amadou Hampaté Bâ lui-même ; ses aventures et mésaventures, souvent rocambolesques, forment la trame d’une intrigue aux multiples rebondissements. Élevé comme « un bon fils de Bambara » et ayant passé toutes ses initiations, Wangrin incarne l’homme des deux mondes, dans la mesure où il suit aussi les cours de l’« école des otages ». Après avoir obtenu le certificat d’études primaires, le plus haut diplôme auquel puisse prétendre un indigène, à l’époque où se situe l’action, il devient instituteur. Ses fonctions d’interprète auprès de différents commandants de cercle, ces « dieux de la brousse », ne tardent pas à faire de lui un personnage redoutable dont les multiples roueries n’épargnent ni ses compatriotes, ni les « Blancs-Blancs » qui ont l’imprudence de croiser son chemin. Rien ne semble devoir freiner l’ascension du héros, mais placé à sa naissance sous le signe de Gongoloma-Sookè, le dieu des contraires, son destin tourne : la destruction de son fétiche et le meurtre involontaire de son animal totem, le python sacré, entraînent sa perte, comme si l’Afrique un moment usurpée reprenait finalement tous ses droits. Nommé ambassadeur du Mali au lendemain de l’indépendance, il poursuit, avec l’aide de l’UNESCO, ses travaux historiques, anthropologiques et spirituels : Koumen, L’Éclat de la grande étoile, Njeddo Dewal, mère de la calamité, et surtout Kaïdara, sont autant d’illustrations de la grande tradition initiatique peule. Hampaté Bâ a également laissé deux récits autobiographiques, Amkoullel, l’enfant peul, où il relate les vingt premières années de son existence et porte témoignage sur la société coloniale du début du siècle et Oui, mon Commandant dans lequel il évoque sa carrière de fonctionnaire.

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