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épithétisme épître épopée essai estampie esthétique de la réception estoire états du monde éthopée

épithétisme (n. m., de épithète). Figure qui consiste à modifier ou à développer une idée principale par l’expression d’une idée accessoire soutenue par un caractérisant (proposition relative, adjectif). Exemple de La Fontaine : Le héron au long bec, emmanché d’un long cou.

épître (n. f., du grec epistolè, « lettre, message »). Au Moyen Age, l'épistre est une variété de dit qui se présente comme une lettre (epistula) envoyée à ou par un personnage réel ou imaginaire (mythologique, littéraire, allégorique...). Elle se présente généralement comme un plaidoyer et cherche avant tout à convaincre. Elle peut mêler la prose et les vers. Elle a été particulièrement pratiquée par Christine de Pisan. Les saluts d’amour sont des épîtres. A la Renaissance, l’épître en vers imitée d’Horace, qui s’adresse à un personnage réel ou fictif sur des sujets variés, est remise à l’honneur et pratiquée avec prédilection par Marot. Les épîtres restent fréquentes pendant toute la période classique et tout particulièrement chez Boileau et Voltaire (Épître à Boileau en 1769, Épître à Horace en 1772).

épopée (n. f., du grec epos, « paroles d’un chant, vers », et poïein, « faire », d’où epopoïa, « poème épique »). Long poème à la gloire d’un (ou plusieurs) héros ou d’une nation, qui mêle souvent le surnaturel et le merveilleux au récit des exploits et des hauts faits. Dans son Esthétique, Hegel lie l’épopée et l’univers historique et humain qui l’entoure : « L'épos, lorsqu’il raconte ce qui est, a pour sujet une action qui, par toutes les circonstances qui l’accompagnent et les conditions dans lesquelles elle s’accomplit, présente d’innombrables ramifications par lesquelles elle se trouve en contact avec le monde total d’une nation et d’une époque. » L’épopée de référence est l’Iliade d’Homère, mais, dans le domaine français, on peut citer comme exemple Les Tragiques d’Agrippa d’Aubigné (1616).
Si le classicisme continue de considérer l’épopée comme un grand genre, aucune œuvre éclatante, cependant, ne l’illustre et La Henriade de Voltaire (1728), par exemple, est aujourd’hui bien oubliée. Dans le partage hérité d’Aristote entre l’épique et le dramatique, c’est le roman qui désormais prend peu à peu la place de l’épopée en vers et devient à lui seul la littérature narrative. La dimension épique s’affaiblit également dans le champ de la poésie, bien qu’elle reste présente dans La Légende des siècles (1859) de Hugo dont le sous-titre, Petites Épopées, montre bien qu’à ses yeux l’âge des longs poèmes est révolu. Néanmoins, l’épique ne disparaît pas totalement et, en 1924, l'Anabase de Saint-John Perse en garde certainement la trace.

essai. Au sens large, tout texte d’idées d’une certaine ampleur, mais qui ne prétend pas à l’exhaustivité du traité ; au sens étroit, ouvrage de réflexion d’abord caractérisé par un ton personnel, des développements garantis par la sincérité de l’énonciateur plus que par la rigueur démonstrative, une écriture qui joue sur le discontinu, le raisonnement par analogie, le recours à une rhétorique de la persuasion plus que de la conviction. Le mot « essai » semble avoir été utilisé pour la première fois, au sens que nous lui donnons aujourd’hui, par Montaigne (1580). Le genre est désormais perçu comme hybride, insaisissable, laissant à l’auteur la possibilité d’user de tous les stratagèmes littéraires possibles : pseudo-dialogues, écriture poétique, recours au récit exemplaire... On a proposé plusieurs classifications des essais : les unes à base thématique (essai philosophique, politique, biographique, littéraire...), les autres à base rhétorique (essai polémique, doxologique...). L’essai est avec le roman — dont il partage certaines caractéristiques, dont l’hétérogénéité interne - le grand genre de la modernité.


estampie (n. f.). Forme poétique médiévale, de nature lyrico-chorégraphique, composée de strophes hétérométriques où des vers courts alternent par séries avec des vers plus longs, et qui sont associées deux à deux sur un même système de rimes et de mètres. Le nombre de vers varie d’une double strophe à la suivante. Voici les cinq premiers vers des deux premières strophes (qui en comptent chacune treize) d’une estampie : Doucement,/ Sovant / M’esprent / Forment / Amours et dame anvoixie [joyeuse], [...] Avenant / Cors gent, / Fiant, / Plaixant / A celle qui me maistrie.

esthétique de la réception. On appelle réception d’une œuvre son accueil public et critique, mais aussi la façon dont elle se situe face aux positions idéologiques et esthétiques du lectorat visé, l’interprétation à laquelle elle donne lieu, la place qu’elle prend dans l’imaginaire littéraire. Les travaux critiques allemands de l’École de Constance, dont le représentant le plus important reste H. R. Jauss {Pour une esthétique de la réception, 1975), ont montré que l’on ne pouvait pas considérer l’œuvre indépendamment de sa réception effective et de l’évolution de cette réception dans le temps. Le concept clé de ce type d’analyse est celui d’« horizon d’attente » (erwartungshorizont), défini comme l’ensemble des critères (littéraires, politiques, éthiques...) à partir desquels un groupe donné de lecteurs comprend et juge une œuvre. Cet horizon d’attente est en perpétuelle évolution et notre lecture de Madame Bovary ou des Fleurs du Mal n’a rien à voir avec celle d’un lecteur de 1857 : tout se passe comme si nous n’avions plus affaire au même texte, puisque nous le lisons avec des attentes et des valeurs complètement différentes. L’esthétique de la réception se situe donc entre la sociologie de la littérature, l’histoire littéraire et la poétique de la lecture (qui considère les procédures par lesquelles le texte gère, oriente, trouble la lecture qui en sera faite).


estoire (n. f.). Ce ternie, issu du latin historia, désigne au Moyen Age un récit, en vers ou en prose, qui prétend à la véracité : récit historique (Estoire des Engleis de Gef-frei Gaimar, Estoire de la guerre sainte d’Ambroise, XIIe siècle) ou récit fictif inspiré par les Écritures saintes (Estoire del saint Graal, qui amplifie vers 1200-1230 l’Évangile de Nicodème). Le terme s’oppose à fable (au sens de récit inventé) et, dans une moindre mesure, à conte, et, du point de vue formel, à chanson (de geste) dans la mesure où il exclut tout accompagnement musical.

états du monde. Terme générique désignant, au Moyen Age, un texte, généralement versifié, qui passe en revue les différents « états » de la société (noblesse, clergé, paysans, bourgeois, etc.) pour dénoncer les abus et définir les obligations morales et sociales de chacun d’eux. Le ton est volontiers satirique et moralisateur (Livre des manières d’Étienne de Fougères vers 1172, Vers de Thibaut de Marly, Bible Guiot de Guiot de Provins, Bible au seigneur de Berzé, Roman de Garité du Reclus de Molliens au XIIIe siècle, etc.).

éthopée (n. f.). Au sens propre, il s’agit de la mise en scène de caractère (ethos), qui dans les exercices classiques de la rhétorique passait surtout par l’invention d’un discours prêté à un personnage (faire parler Ulysse retrouvant Pénélope, faire parler Andromaque après la mort de son fils, etc.). Avec le genre du « caractère », l’éthopée s’est élargie à la description des traits moraux d’un personnage donné, comme chez La Bruyère, et cet exercice demeure au cœur des portraits littéraires en général, dans le roman ou au théâtre (cf. la scène des portraits dans Le Misanthrope de Molière) : il s’agit de montrer en quoi les caractéristiques morales du personnage animent toutes ses actions.


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