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iambe (n. m., du grec iambos, de même sens). Pied composé de deux syllabes, la première brève, la seconde longue. Dans les systèmes prosodiques accentuels, c’est le pied formé d’une syllabe non accentuée et d’une syllabe accentuée. A la fin du XVIIIe siècle, André Chénier a donné ce nom, ïambes, à son dernier recueil, fondé sur une alternance régulière d’alexandrins et d’octosyllabes. Exemple : La patrie allume ma voix ; La paix seule aguerrit mes pieuses morsures : Et mes fureurs servent les lois.
idéogramme lyrique. Apollinaire avait pensé appeler ses calligrammes des « idéogrammes lyriques » lorsqu’en 1914 il avait mis le recueil projeté en souscription.
Idéologues. Groupe de philosophes et de savants qui, sous la Révolution et l’Empire, tâchèrent de mettre en œuvre les objectifs de la philosophie des Lumières. Ce sont les intellectuels de la Révolution. On leur doit le système métrique (Lagrange, 1795), les grandes Écoles (Lakanal, Monge), l’organisation de l’institut de France (Daunou, 1795). Héritiers de Condillac, hostiles aux spéculations métaphysiques, ils s’attachent avec leur principal théoricien Destutt de Tracy (1754-1836) à l’analyse des facultés humaines {Eléments d’idéologie, 1801-1815). Les Rapports du physique et du moral du médecin Georges Cabanis (1757-1808) inspirent d’autres médecins comme Bichat, Broussais, Pinel et contribuent à la naissance de ce qui est alors nommé « sciences morales », annonçant l’anthropologie moderne. Philosophiquement, les Idéologues font le lien entre le XVIIIe siècle et le positivisme d’Auguste Comte. Suspects au pouvoir napoléonien, ils seront honnis sous la Restauration. Le courant romantique issu de Chateaubriand dénonce leur matérialisme. A peu près seul parmi les écrivains de sa génération, Stendhal s’affirme leur disciple en ramenant tout au jeu des passions et des sentiments de l’individu. Les Idéologues sont de médiocres écrivains. Cependant l’ouvrage de Volney Les Ruines ou Méditations sur les révolutions des empires (1791) restera pouf tout le romantisme une référence majeure et l’idée de la perfectibilité de l’homme, que Volney énonce quatre ans avant Condorcet, nourrira tout le courant progressiste du XIXe siècle.
idiolecte. Ensemble des usages langagiers d’un individu, ou - plus spécifiquement - terme ou tournure caractéristique d’une personne. L’idiolecte d’un individu se forme en effet au contact des diverses pratiques linguistiques (sociales, professionnelles, dialectales...) qu’il croise. Certains écrivains ont fortement caractérisé leurs personnages par leur idiolecte : ainsi Rabelais, dont l’écolier limousin s’est forgé un langage propre, combinant avec prétention une syntaxe française et un vocabulaire latin {Pantagruel, 1532). On peut dire que le style d’un auteur est son idiolecte.
idiotisme (n. m., du grec idios, « particulier »). Expression ou construction particulière à une langue. Oh distingue : - les idiotismes de figure : « être aux pièces » ; - les idiotismes grammaticaux : « l’échapper belle ».
idylle (n. f., du grec eidullion, « petit tableau », diminutif de eidos, « forme »). Petit poème hérité de la littérature antique (Théocrite par exemple) à thème amoureux dans un cadre bucolique. C’est à la Renaissance que le genre a été remis à l’honneur et il restera pratiqué pendant tout l’âge classique : Idylles de Rampalle (1648) et Idylles de Chénier à la fin du xviiie siècle.
Idylle. Petit poème chantant l’amour dans un décor pastoral. Le modèle du genre est constitué à l’époque alexandrine par les Idylles de Théocrite qui insèrent la célébration amoureuse dans des récits ou des poèmes dialogués. Avec l’églogue et la bucolique, l’idylle appartient à la poésie pastorale. La poésie descriptive du xvme siècle la remettra à l’honneur (cf. les Idylles de Gessner)
illocutoire. En pragmatique, on appelle valeur illocutoire ou force illocutoire le statut d’un énoncé : question, conseil, information, menace, salutation, promesse... -On considère donc que « Il pleut sur la ville » et « Pleut-il sur la ville ? » ont le même contenu propositionnel (ou valeur locutoire), mais des statuts illocutoires différents : les mêmes faits sont soit avancés à titre d’information, soit soumis à la validation de l’allocutaire. Le statut illocutoire d’un énoncé se dégage parfois du contexte : « Entre ici... » est-il un ordre, une invitation, une autorisation ? Le statut illocutoire des énoncés littéraires (notamment dramatiques ou fictionnels) a donné lieu à des débats fort complexes.
image. Dans l’analyse littéraire, le terme désigne de manière générique des figures qui mettent en rapport deux référents qui diffèrent l’un (comparé, imagé) désigne proprement ce dont parle le texte, l’autre (comparant, imageant) peut être pris dans un autre référent et éclaire ou illustre le premier, ou encore jette sur lui une lumière nouvelle en utilisant ce qu’ils ont d’analogue ou de proche. Ce sont en premier lieu les figures d’analogie (comparaison, métaphore, allégorie, symbole) qui sont concernées, mais on peut considérer que synecdoque et métonymie sont aussi des images en ce qu’elles présentent la chose sous un jour différent. L’image varie aussi dans son originalité, allant du cliché ou de la lexicalisation par catachrèse à la recherche de l’étrange : « Plus les rapports des deux réalités rapprochées seront lointains et justes, plus l’image sera forte - plus elle aura de puissance émotive et de réalité poétique », écrit Pierre Reverdy en 1918 (Nord-Sud). Chaque image a sa logique propre, qu’il est important d’analyser du côté de l'ima-geant : l’image n’est pas une simple illustration ni un ornement : elle sert le sens et donc l’avancée du texte.
imbroglio. L’imbroglio (mot emprunté à l’italien et qui signifie « embrouille ») est une intrigue de comédie très compliquée et très rapide. L’intrigue du Barbier de Séville de Beaumarchais est un imbroglio. L’imbroglio repose sur des situations dramatiques complexes et fragiles qu’un mot pourrait détruire. Il doit provoquer un effet de suspens passionné et comique tout à la fois. Il exige une vraie virtuosité de la part de l’auteur, du metteur en scène et des acteurs.
imitation. L’imitation est au cœur de la tradition littéraire classique : elle engage soit l’imitation littéraire des modèles (imitation « interne » à la littérature : Racine imite Euripide, Molière imite Plaute, Balzac imite Walter Scott, etc.), soit l’imitation du réel (imitation « externe » : mimesis). Les auteurs classiques pensaient que, pour bien imiter la nature, il suffisait d’imiter ceux qui y étaient le mieux parvenus, à savoir les auteurs anciens. C’est pourquoi l’imitation a une configuration complexe dans la doctrine classique, où elle joue à la fois sur les modèles littéraires et sur une conception stylisée de la « belle nature » (il faut choisir ce qui est beau dans le réel) ; avec l’avènement du réalisme, au XIXe siècle, la problématique de l’imitation interne semble perdre de son importance, alors que la confrontation au réel prend tout son poids (refus de la « belle nature », choix du grotesque, subversion des hiérarchies stylistiques traditionnelles). Pourtant, l’écriture d’un Zola ou d’un Proust doit encore beaucoup à « l’innutrition » et à l’imitation de modèles, notamment en fait de style (Flaubert, les Concourt), comme le montre la fonction du pastiche littéraire chez Proust. De même, le statut de la parodie en littérature, même contemporaine (de Laforgue à Perec), atteste la continuité du problème.
implicite. On regroupe sous ce terme deux types de faits linguistiques sensiblement différents, mais qui ont en commun de concerner des données qui ne sont pas ouvertement (explicitement) présentées dans l’énoncé. On considère d’abord comme implicite ce qui relève de la présupposition : sont présupposées toutes les propositions qui sont considérées comme vraies par l’énoncé et qui restent vraies quand on change la polarité de celui-ci ; les deux phrases de sens contraire : « La décadence des mœurs explique la chute de l’Empire romain » et « La décadence des mœurs n’explique pas la chute de l’Empire romain » tiennent toutes deux pour acquis qu’il y a bien eu décadence des mœurs et que l’Empire romain s’est bien effondré. On peut normalement dégager sans difficulté les présupposés de tout énoncé. L’autre type d’implicite, le sous-entendu, exige en revanche un travail d’interprétation : « Il fait chaud ici » peut vouloir dire « Sortons ! » ou « Ouvre la fenêtre ! ». Contrairement au présupposé, le sous-entendu fait directement partie du message qu’on veut transmettre.