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Les Caractères Jean de LA BRUYERE 1688-1694

C’est à la suite des Caractères de Théophraste, traduits du grec (IVe siècle av. J.-C.) que La Bruyère a modestement présenté Les Caractères ou les Mœurs de ce siècle. Mais l’imitateur éclipse son modèle, d’autant que d’édition en édition (on en compte huit de 1688 à 1694), il a considérablement enrichi son ouvrage. Celui-ci est composé de seize chapitres où se mêlent réflexions, maximes et portraits. Si l’on en croit La Bruyère (Discours à l'Académie française, 1693), les quinze premiers découvrent «le faux et le ridicule qui se rencontrent dans les objets des passions et des attachements humains», pour ruiner tous les obstacles à la connaissance de Dieu, et préparent le seizième « où l’athéisme est attaqué et peut-être confondu ». Ce grand dessein a moins d’originalité et d’intérêt que la peinture de la société française méthodiquement conduite (V. De la société et de la conversation, VI. Des biens de fortune, VII. De la ville, VIII. De la cour, IX. Des grands, etc.). Attaché à «peindre l’homme en général» (Préface), persuadé de la permanence de la nature humaine, La Bruyère est fidèle à la tradition des moralistes classiques (Montaigne, Pascal, La Rochefoucauld). Mais il a aussi le goût du concret et le sens du trait pittoresque, et il s’apparente par là à la tradition réaliste et satirique à laquelle appartiennent des écrivains comme Régnier, Scarron, Molière et La Fontaine. Sur la portée critique des Caractères, les avis sont partagés. A côté d’un éloge conventionnel de Louis le Grand, La Bruyère examine les rapports du souverain et de ses sujets et dénonce la guerre (X. Du souverain ou De la république). Aux privilèges de la naissance et de la fortune, il oppose les droits du mérite et les exigences de la justice. Aussi certains veulent-ils voir dans son attitude l’annonce du siècle des Philosophes, tandis que d’autres se déclarent déçus par la timidité d’un homme qui ne met pas fondamentalement en cause les principes de la société de son temps et se cantonne dans un rôle d’observateur amer. Lé style de La Bruyère, concis et spirituel, a toujours été universellement loué et imité, particulièrement au XVIIIe siècle, par les écrivains qui, d’ailleurs, dans leur pensée critique, sont allés plus loin que lui (cf. Montesquieu, Voltaire).

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