Les Lumières (présentation)
Lumières. Mouvement philosophique et littéraire qui caractérise la pensée du XVIIIe siècle, de la mort de Louis XIV à la Révolution. Il est un héritage direct du libertinage du XVIIe siècle, que Bayle (1682, Pensées sur la comète) et Fontenelle (1686, Entretiens sur la pluralité des mondes) perpétuent à l’orée du XVIIIe siècle. L’esprit des Lumières est une conséquence de la «crise de la conscience européenne» qui secoue l’Europe de 1680 à 1715, décrite par Paul Hazard. Les Lumières sont un acte de foi dans le progrès humain, un hymne à la pensée scientifique. L’homme nouveau a le sentiment que les découvertes de Copernic, Galilée et Newton sont en train de révolutionner la conception de l’univers. Les Lumières substituent à la lumière surnaturelle la lumière de la raison qui va permettre la naissance d’un monde autre. L’esprit des Lumières se concrétise dans une entreprise de vaste envergure, l'Encyclopédie, premier dictionnaire moderne qui a pour but de faire le point sur toutes les connaissances de l’époque. Tout le savoir humain doit être concentré dans cet ouvrage qui a pour maître d’œuvre Diderot. Celui-ci en rédige le «prospectus» en 1750. Il confie la responsabilité de coordonner toute la partie scientifique à d’Alembert, qui rédige le «Discours préliminaire» en 1751, à la parution du premier volume. Diderot introduit une partie sur les techniques avec des planches qui illustrent les arts mécaniques. L’entreprise, immédiatement attaquée par les jésuites à cause de l’esprit de libre examen qui la caractérise, est soutenue par Malesherbes. Les plus grands auteurs du XVIIIe siècle y participent, rédigeant plusieurs articles, notamment Montesquieu, Voltaire, Rousseau. Résolument moderne, l’esprit des Lumières signe la fin de la conception médiévale d’un univers clos. Cette laïcisation du monde débouche tantôt sur le déïsme (Voltaire conserve l’idée d’un dieu créateur, conçu comme le premier moteur), tantôt sur le matérialisme, chez Diderot par exemple. Ces divergences profondes se solderont par des ruptures, la brouille retentissante de Rousseau et des Encyclopédistes, la dissension plus voilée de Voltaire et des matérialistes. Dans le domaine social et économique, les philosophes des Lumières, apôtres de la tolérance, soucieux d’égalitarisme, préparent lentement l’éclosion des idées révolutionnaires. Plusieurs points essentiels de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen sont directement empruntés au Contrat social de Rousseau (1762). Malgré la modernité de leur pensée, les philosophes des Lumières, en matière politique, appartiennent encore à l’Ancien Régime, optant pour le gouvernement du despote éclairé (c’est le cas de Voltaire et de Diderot). La république ne leur appa raît convenir qu’à un tout petit nombre. Les derniers représentants des Lumières en 1789 applaudiront la Révolution, tout en marquant une certaine peur à l’entrée du peuple sur la scène politique.
• Hazard P., La Crise de la conscience européenne, 1680-1715, Paris, Fayard, 1961.