MAURIAC François 1885-1970
MAURIAC François 1885-1970
Romancier, auteur dramatique, mémorialiste et pamphlétaire, né à Bordeaux. Après des études chez les marianistes, au collège de Caudéran, il passe à Bordeaux sa licence ès lettres et, décidé à devenir écrivain, se rend à Paris. Ses premiers livres seront des poèmes encore un peu timides : Les Mains jointes (1909), que suivra bientôt l'Adieu à l’adolescence (1911), éblouissant envol qui est aussi une explosion de joie sensuelle. Mais il donnera encore les Huit poèmes de 1924, puis le recueil Orages (1926), et plus tard Le Sang d’Atys (1940), une des plus denses - une des plus poignantes aussi - de toutes ses œuvres. Car cet écrivain catholique est d’abord un homme au sang vif, un ardent lyrique, et ce n’est pas trop de toutes les haires et sangles morales qu’il s’est appliquées pour parvenir à maîtriser une complexion violente (Les passions ne sont belles que retenues, écrit-il dans Le Journal d’un homme de trente ans). Ses débuts très audacieux dans la carrière romanesque avec L’Enfant chargé de chaînes (1912) vont précéder de peu son mariage; mais l’activité de l’écrivain est aussitôt interrompue par la guerre, et par un long séjour à l’hôpital sur le front d’Orient. C’est alors une prodigieuse série’ de succès qu’inaugure Le Baiser au lépreux (1922) ; histoire d’une jeune femme que son mariage avec un être disgracié transfigure peu à peu, de manière inattendue, jusqu’à accéder pour finir à la plus émouvante et sereine abnégation. Suivront bientôt Genitrix (1923, court et puissant chef-d’œuvre), Le Désert de l’amour (1925), Thérèse Desqueyroux (1927), Le Nœud de vipères (1932), Le Mystère Frontenac (1933, nourri de maints souvenirs de l’auteur), Les Anges noirs (1936), Les Chemins de la mer (1939, où le poème d’Atys apparaît déjà) ; puis Le Sagouin (1951), L’Agneau (1954), Un adolescent d’autrefois (1969). À cette altière chaîne de montagnes dont nous n’avons pu citer que quelques sommets, s’ajoute l’œuvre considérable d’un moraliste, fasciné par le transport enivrant des mystiques tout autant que par l’enrichissante prostration des ascètes (La Rencontre avec Pascal, 1926 ; Le Tourment de Jacques Rivière, 1926 ; Conscience, instinct divin, 1927 ; La Vie de Jean Racine, 1928 ; Dieu et Mammon, 1929 Blaise Pascal et sa sœur Jacqueline, 1931 ; Souffrances et bonheur du chrétien, 1931 ; Vie de Jésus, 1936). Mais, au lendemain de l’armistice de 1940, et (plus encore) depuis la fin de la guerre, est apparu un Mauriac polémiste, aussi riche en muscle qu’en nerf (articles du Figaro à la Libération, puis de L’Express, enfin du Figaro littéraire), fort à son aise dans le siècle et dans ses luttes à l’arme blanche. On peut cependant préférer, dans ce domaine, sa période clandestine, durant l’Occupation. (Le Cahier noir, paru en 1943 sous le pseudonyme de « Forez », devrait d’ailleurs être rangé parmi les œuvres poétiques de l’auteur.) À quoi vient s’ajouter au cours de ses dernières années, l’œuvre - majeure, peut-être - du mémorialiste (Mémoires intérieurs, et Nouveaux Mémoires intérieurs, 1959-1965 ; Mémoires politiques, 1967).
Reste l’homme de théâtre : quatre pièces qu’on a pu juger de façon très diverse, mais auxquelles on ne peut contester, tout au moins pour deux d’entre elles, Asmodée (1938) et Les Mal Aimés (1945), l’accueil retentissant (le triomphe, égal à chaque reprise) que le public leur a réservé. L’appui que recherche ici le romancier Mauriac auprès d’illustres modèles (depuis Molière jusqu’aux pires auteurs de mélodrame) était bien inutile puisqu’il s’y révèle aussi maître de son art, aussi puissant que dans Les Anges noirs ou Genitrix, et puisqu’il garde en main le même ressort tragique. Ce ressort, étonnamment efficace tout au long de la double carrière du dramaturge et du romancier, tenterons-nous d’en analyser ici les composantes ? Disons que c’est, d’une part, le thème de l’être tyrannique (homme ou femme indifféremment), préoccupé de tout connaître des autres en général, mais plus encore de ceux qui l’aiment, et ce, non pour les aimer davantage, mais pour mieux les dominer tant dans leur cœur que dans leur âme ; et puis le thème, d’autre part, de l’être vulnérable, affligé d’une infinie capacité de désir, aimé de ceux-là seulement qu’il ne désire pas (et qui juge que c’est bien ainsi ; que c’est justice). Ces deux « constantes » de la thématique mauriacienne envahissent de leurs entrelacs aussi bien Asmodée que Les Mal Aimés ; et ce n'est pas là le seul titre que peuvent avoir ces deux pièces à prendre place parmi les plus bouleversantes et les plus impérissables réussites du romancier Mauriac.
■ Œuvres - En poche : Œuvres romanesques, 191 F1951 (Le Livre de Poche, coll. Pochothèque). - Thérèse Desqueyroux (Le Livre de Poche). - Le Nœud de vipères, (id.). - Genitrix (id.). - Un adolescent d'autrefois (Garnier-Flammarion). - AUTRES : Toutes les œuvres, jusqu'en 1959, sont publiées chez Fayard. - Œuvres romanesques et théâtrales, éd. par J. Petit (en 4 vol., Bibl. de la Pléiade). - Œuvres autobiographiques, éd. par F. Durand (id.).