miniature minnesang miroir mise en abyme mise en scène modalisation modernité
miniature. Dans les manuscrits médiévaux, petit tableau de dimensions variables, ayant généralement la largeur de la colonne de texte, destiné à illustrer un épisode, un chapitre, un paragraphe. Lorsque la miniature prend des dimensions imposantes (la moitié de la page, voire une page entière), on emploie le terme de peinture.
minnesang (n. m., emprunté au haut allemand, « chant d’amour »). Nom donné à la poésie courtoise allemande du Moyen Age, particulièrement florissante en Allemagne du Sud de la fin du XIIe siècle au début du XIVe siècle, héritière de la lyrique française d’oc et d’oïl (Walther von der Vogelweide, Hartmann von Aue, adaptateur d'Erec et Enide, Wolfram von Eschenbach, auteur du Parzifal, Johann Hadlaub vers 1300).
miracle. Au Moyen Age, il existe deux formes littéraires qui portent ce nom en raison de leur contenu (un miracle accompli par un saint) : le miracle narratif (Miracles de Gautier de Coinci, XIIIe siècle) et le miracle par personnages, qui est destiné à la représentation théâtrale (Miracle de Théophile de Rutebeuf, vers 1260, ou les quarante Miracles de Nostre Dame par personnages du manuscrit de Cangé, au XIVe siècle). Très souvent, le second n’est que la transposition pour la scène d’un miracle narratif préexistant. Le miracle du saint ou de la Vierge est transposé dans le cadre de la société contemporaine.
miroir (en latin, spéculum). Genre didactique médiéval, dépourvu de toute unité, dont le contenu peut être soit encyclopédique (Spéculum triplex de Vincent de Beauvais), soit moral (les « Miroirs des princes » sont des traités de théorie politique, le Miroir des Dames de Durand de Champagne, fin XIIIe siècle, est un traité d’instruction morale à l’usage des femmes), soit historique (Mirouer historial abrégé de France, au XIVe siècle).
mise en abyme. Expression empruntée à l’héraldique (il y a mise en abyme lorsque la totalité d’un blason est représentée dans une de ses parties). Il y a mise en abyme (ou abîme) textuelle lorsqu’un texte se prend lui-même pour objet, ou se présente lui-même comme élément du récit (roman dans le roman), de la pièce (théâtre dans le théâtre)... On parle parfois aussi d’« effet de miroir », par analogie avec deux miroirs mis face à face et se reflétant. C’est André Gide qui a fait le succès de l’expression : dans Les Faux-monnayeurs (1925), il met ainsi en scène un romancier qui écrit Les Faux-monnayeurs.
mise en scène. L’expression a deux significations : elle signifie tantôt l’acte de mettre en scène une pièce de théâtre (« la Comédie-Française confie la mise en scène de Bérénice au metteur en scène allemand Gruber »), tantôt son résultat, c’est-à-dire l’ensemble des moyens réunis sur la scène, décor, costumes, jeu des comédiens, et l’interprétation qu’ils mettent en œuvre (« la mise en scène de Bérénice était passionnante »). L’expression apparaît, d’après Veinstein, en 1820. Elle est symptomatique de la lente montée, à travers le xviiie siècle, d’une exigence d’unité de la représentation et du besoin d’un univers fictif séparé de celui du spectateur (scène boîte). Mais alors elle n’est pas encore justiciable d’une spécialisation artistique : un acteur de la troupe ou l’auteur lui-même veille à la mise en place des acteurs et tente d’unifier leur jeu et leurs costumes. Pixerécourt (que les comédiens appelaient « férocios poignardini » à cause de son exigence et de son tempérament) explique fort bien le rôle de ce qu’il appelle « l’entente de la scène » dans le succès de ses mélodrames. Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle, avec Antoine ou Lugné Poë, puis Stanislavski et Appia que la chose vient vraiment répondre au mot. La mise en scène résulte de deux nécessités qui ne sont contradictoires qu’en apparence, celle du réalisme minutieux et celle de la poésie idéalisante du théâtre symboliste : dans les deux cas, il s’agissait en effet de proposer au spectateur un univers clos, cohérent, fictif et séparé de lui. Et si un choix de ce type implique une mise en scène, c’est aussi vrai du choix inverse, celui d’une représentation épique (comme l’implique le prologue du Soulier de satin de Claudel).
Une autre raison explique l’importance qu’a prise progressivement la mise en scène : l’existence exponentielle d’un répertoire dont l’origine s’éloigne de plus en plus dans le temps, qui rend impossible une approche totalement naïve de ses chefs-d’œuvre et exige une interprétation, une « lecture » renouvelée. Il ne s’agit plus seulement de « fédérer » les différents éléments hétéroclites qui composent la représentation, mais d’établir un texte ancien dans l’absolu présent de la représentation théâtrale. La mise en scène implique donc nécessairement le choix des relations que le spectacle va entretenir avec le public : distance, distanciation, illusion, adhésion, etc. Acte interprétatif global et acte créatif simultanément, la mise en scène s’est imposée, au cours du XXe siècle, dans une rivalité croissante avec l’art individuel de l’acteur (parfois réduit, dans la ligne d’une interprétation littérale des textes de Gordon Craig, au statut de marionnette) et avec l’écriture dramatique qu’elle a parfois totalement remplacée (c’est le cas chez Bob Wilson, Roméo Castel-lucci ou Carles Santos).
modalisation. On parle de fait de modalisation lorsque le locuteur nuance son adhésion au contenu de son énoncé. Ce marquage évaluatif peut prendre des formes diverses : il peut s’agir, par exemple, d’adverbes tels que «peut-être», «probablement», «vraiment»..., de compléments énonciatifs comme « d’après moi », « sauf erreur »... ou de termes impliquant une position subjective. Dans un récit en focalisation interne, les modalisateurs sont attribués au personnage focalisant : il la trouva franchement laide. Elle lui déplut, enfin (L. Aragon, Aurélien).
modernité. Terme apparu au XIXe siècle avec plusieurs acceptions différentes : 1. Synonyme de la période que les historiens nomment les Temps modernes et qui s’étend de la fin du Moyen Age à l’époque contemporaine (sens attesté dès 1823 chez Balzac. Il serait commode d’écrire en ce cas le mot avec une majuscule). 2. Caractère de ce qui est moderne, par opposition à ce qui est ancien, traditionnel ou permanent (« La vulgarité, la modernité de la douane [...] contrastaient avec l’orage, la porte gothique, le son du cor et le bruit du torrent », Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, 4e partie, épisode en date du 19 mai 1833). 3. Au xxe siècle, l’approfondissement de la réflexion sur l’époque moderne conduit à combiner ces deux sens : modernité peut désigner tout ce qui fait la spécificité de l’époque moderne, dans le domaine technique mais aussi culturel, philosophique, voire anthropologique. Au sens le plus général, la modernité peut alors être définie comme la condition historique de l’homme moderne, condition que l’anthropologue Georges Ballandier caractérise par « le mouvement, plus l’incertitude ». 4. Cependant, l’importance de la notion de modernité en littérature et en esthétique provient du sens particulier que Baudelaire a donné à ce mot, encore senti comme un néologisme à son époque.
Dans son opuscule sur Le Peintre de la vie moderne (1863, écrit en 1860), Baudelaire définit la modernité comme ce qui passe avec la mode, mais dont l’artiste ne peut se dispenser de tenir compte ; c’est « le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art, dont l’autre moitié est l’éternel et l’immuable ». Il serait donc vain de vouloir cerner cette modernité par des traits permanents, repérables une fois pour toutes. La modernité est au contraire ce qui change, « l’estampille que le temps imprime à nos sensations » (Baudelaire), « une fonction du temps » (Aragon, 1929), « la faculté de présent » (Meschonnic, 1988). En faisant de la modernité « la moitié de l’art », Baudelaire, le premier, donne au mot un contenu esthétique positif. L’émergence de la notion en 1860 est certes en rapport avec le contexte historique général : développement de l’urbanisation, des chemins de fer, etc. Mais fondamentalement, Baudelaire délie cette notion d’une époque particulière : « Il y a eu une modernité pour chaque peintre ancien ». Il refuse de privilégier le moderne ou l’ancien (« Emporte-moi wagon ! Enlève-moi frégate ! » : bon exemple de la mise en parallèle, sur un même plan de valeur, d’une réalité ancienne et d’une nouveauté contemporaine de l’auteur). C’est dire que la modernité baudelairienne n’est pas le modernisme. Ce mot connote un choix délibéré en faveur du moderne ou du plus récent et une valorisation systématique de l’innovation. C’est le fait des avant-gardes, que l’on se gardera de confondre avec la modernité. Avec le décadentisme (et dans une certaine mesure le naturalisme) de la fin du XIXe siècle, on peut même parler d’une « modernité anti-moderniste », le monde contemporain étant perçu d’une manière à la fois aiguë et largement négative. 5. Au pluriel, modernités peut désigner à l’occasion des réalités, comportements ou sentiments propres à l’époque moderne (Jean Lorrain, Modernités, 1885). Mais dans la critique contemporaine, ce pluriel renvoie en général aux esthétiques nécessairement diverses qui résultent, dans la perspective baudelairienne, du caractère fugace de la modernité elle-même.
modulation. Passage d’une tonalité à une autre, changement d’intensité ou de hauteur dans la voix et dans la diction, variation dans le style, dans le timbre des phonèmes (voyelles et consonnes).
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- Au théâtre, si l'on veut créer l'illusion (du réel), pensez-vous d'une part que la mise en abyme suffise, d'autre part que le rapport frontal scène-public soit efficace ?
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- Un certain nombre d'oeuvres littéraires ou cinématographiques mettent en scène des personnages marginaux (mauvais garçons, courtisanes, parasites, aussi bien que l'aventurier ou le solitaire par choix). En vous appuyant sur des exemples précis, vous étudierez ce qui fait leur marginalité, et comment à travers eux la société est mise en question.
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