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roman (au Moyen Âge). Le terme de roman (ancien français romanz, de romanice, « en langue romane ») a été d’abord utilisé au Moyen Age pour désigner non pas la forme romanesque, mais un texte transposé, translaté du latin en langue romane, quelle que soit sa nature. Il peut donc présenter aussi bien un traité allégorique {Roman des Ailes de Courtoisie, XIIIe siècle) ou un poème moral et satirique {Roman des Romans) qu’une œuvre narrative. Chrétien de Troyes utilise le terme dans l’épilogue du Chevalier au lion : Del Chevalier au lyeon fine [termine] / Crestïens son romans ensi, sans que l’on puisse décider s’il pense déjà à une forme littéraire nouvelle ou s’il ne fait référence qu’à la langue. Au XIIe siècle, les romans sont versifiés ; la prose concurrence le vers à partir du XIIIe siècle et tend ensuite à se généraliser. Au XIVe siècle, le terme est encore utilisé quelquefois pour désigner des textes non narratifs : le Roman de vrai amour est un poème spirituel sur l’amour de Dieu pour l’homme, et le Roman de Fauvel une œuvre allégorique et satirique. Il faut signaler qu’au XIIIe siècle s’est ajouté un autre sens : dans les manuscrits des chansons de geste en particulier, « roman » désigne le texte écrit, dans sa matérialité, par opposition à la « chanson », qui est le même texte mais envisagé sous l’angle de sa profération ; dans une rédaction de Gaydon, le jongleur se vante de connaître par cœur la bonne version de la chanson, « car, dit-il, j’en ai le roman ».

roman antique (ou d’Antiquité). L’une des premières formes romanesques du Moyen Age (milieu du XIIe siècle), qui consiste en une traduction-adaptation d’œuvres illustres de l’Antiquité gréco-romaine en langue vulgaire : Roman de Thèbes (1150, à partir de la Thébaïde de Stace), Roman d’Énéas (1160, à partir de l'Énéide), Roman de Troie (1160, à partir d’une rédaction latine tardive d’un résumé de l'Iliade), Roman d’Alexandre (à partir du roman du pseudo-Callisthène), auxquels on peut adjoindre quelques textes plus courts mais de même inspiration (Piramus et Tisbé, Narcissus, Philoména). Ces textes, inspirés de l’épopée antique ou de textes mythologiques tirés des Métamorphoses d’Ovide, sont dénommés romans parce qu’ils sont rédigés en langue romane. Ils sont un véritable laboratoire où s’est élaborée une rhétorique originale, fondée sur l'annominatio, l'interprétation la fréquentatio, l'oppositum, qui devait aboutir au style courtois. Au-delà de la narration historico-légendaire, ils s’attachent à la peinture des personnages féminins, peu pratiquée dans les chansons de geste, et à celle de la naissance de l’amour, selon une rhétorique inspirée par l’Ovide des Héroïdes, de l'Ars amatoria et des Amores. En ce sens, ils constituent bien la première expérience romanesque de notre littérature.

Roman antique. Roman versifié, en octosyllabes le plus souvent, qui s’inspire des légendes antiques. Il constitue, de 1130 à 1160, une forme de transition entre l’épopée et le roman courtois. Ex : le Roman d’Alexandre, l'Enéas, le Roman de Thèbes narrent les hauts faits, mais également les amours, d’Alexandre le Grand, d’Enée, d’Etéocle et de Polynice. Les auteurs, des clercs, traitent leurs personnages, issus de l’Antiquité grecque ou latine, en chevaliers du XIIe siècle, tant au niveau des mœurs que du langage, ce qui est à l’origine d’anachronismes constants.


roman arthurien. Nom donné aux œuvres romanesques qui, du XIIe au XVe siècle, situent leur action à la cour du roi Arthur. Ces romans peuvent être en vers ou en prose : au XIIIe siècle, les deux formes sont concurrentes, mais les romans en vers relatent généralement un épisode de la vie d’un héros particulier (Gauvain ou son fils Guinglain, Fergus, Yder, Durmart le Gallois...), tandis que les romans en prose tendent à se constituer en sommes qui couvrent l’histoire entière de la Bretagne jusqu’à la mort d’Arthur : vaste ensemble du Lancelot-Graal, qui rassemble cinq romans parfois gigantesques, Tristan en prose, puis, aux limites du XIVe et du XVe siècle, Perceforest qui remonte les temps des origines jusqu’à Alexandre le Grand. Le dernier grand roman arthurien, au XVe siècle, est Ysaïe le Triste, fils de Tristan. Le roman arthurien, depuis Chrétien de Troyes, est caractérisé par la prédominance de l’aventure chevaleresque, qui prend fréquemment la forme d’une structure de quête (quête d’un personnage qui a disparu, quête d’un objet comme le Graal, quête d’une pénitence ou d’un rachat comme dans le Chevalier au lion), alternant avec des moments de grands rassemblements à la cour.


roman à thèse. Cette appellation générique est utilisée pour des romans dont le but est de conduire le lecteur à adhérer à un contenu idéologique présenté et exemplifié dans le récit. Elle est généralement réservée aux romans de la seconde moitié du XIXe siècle et du XXe siècle, et le plus souvent utilisée de façon péjorative (l’expression « roman d’idées » étant utilisée en bonne part). Le roman à thèse est donc perçu comme une forme dégradée du roman philosophique des siècles classiques, en ce sens qu’il assènerait un propos doctrinal au lecteur, au lieu de le conduire à faire un parcours de réflexion. Il se caractérise par : une thèse exprimée à divers endroits du récit, sous la forme d’une digression, d’un dialogue, etc. ; une diégèse qui entérine et illustre cette thèse : la catastrophe attend, par exemple, celui qui s’entête dans la voie que condamnent diverses voix du roman. On donne souvent comme exemples emblématiques du roman à thèse certains textes du tournant du XIXe et du XXe siècle, dont les romans de Paul Bourget {Le Disciple, 1889) ou de Maurice Barrés {Les Déracinés, 1897), ou encore - dans les années 1930-1940 - les romans politiques d’André Malraux ou de Jean-Paul Sartre.

roman baroque. Le roman est sans doute un des genres phares de la période baroque (1594-1661) : sa plasticité est en effet conforme à une esthétique de la métamorphose et du mouvement, et la liberté que le genre conserve par rapport aux poétiques instituées, qui régissent surtout le théâtre ou l’épopée, en font le laboratoire de nombreuses formes modernes. Le chef-d’œuvre qui domine toute la période est l'Astrée d’Honoré d’Urfé (1607-1619), qui hérite à la fois de la pastorale, où se mêlent prose et vers (sur le modèle de l'Arcadia de Sanna-zar), et du roman grec (Héliodore, Longus, traduits par Amyot au XVIe siècle). Mais réduire le roman baroque à un seul chef-d’œuvre est injuste en raison de la richesse et de la diversité des formes romanesques : des histoires tragiques, inspirées de faits divers (Rosset), aux romans dévots (qui doivent édifier leurs lecteurs, comme ceux de Jean-Pierre Camus), en allant jusqu’au roman héroïque, dont la structure narrative très riche permet une ampleur exceptionnelle (Gomberville, La Calprenède, Madeleine de Scudéry), le roman de l’âge baroque s’adapte à toutes les sensibilités ; au moment même où la poésie diversifie les formes pour mieux saisir l’esprit anxieux d’une époque déchirée entre la peur de la mort et les mirages de l’illusion, le roman baroque, ouvert sur un monde sans limites (le voyage est sa structure fondamentale), privilégiant l’expression de l’individu (par le biais, notamment, de la psychologie amoureuse et de la quête individuelle), assimile les leçons de l’Antiquité grecque hellénistique (celle des romanciers et des sophistes contemporains de l’Empire romain), dont l’influence se confirme à la même époque dans le champ philosophique (néostoïcisme, épicurisme, scepticisme). Dominé par une structure complexe, avec des débuts in médias res (en pleine action), des retours en arrière, de longues digressions (épisodes insérés), le roman baroque doit beaucoup au romanzo italien (théorisé notamment par le Tasse, dans ses Discours) ; son univers, envahi par les descriptions (ekphrasis) de lieux prestigieux (palais, châteaux, jardins), permet à la prose d’art héritée de la seconde sophistique de se déployer avec virtuosité. L’opéra sera le grand héritier de cette esthétique chatoyante et variée, mais la nouvelle galante lui devra aussi beaucoup : au seuil du XVIIIe siècle, Marivaux, romancier et dramaturge, sera encore un grand lecteur du roman baroque.

roman courtois. Variété du roman médiéval, dont la période de création s’étend principalement des années 1160-1170 à la fin du XIIIe siècle (avec des survivances au-delà), dont les personnages et l’intrigue amoureuse sont marqués par l’idéal de la courtoisie. Les romans arthu-riens sont des romans courtois.

roman cycle, roman-fleuve. On désigne par ces termes des séries romanesques d’ampleur exceptionnelle, c’est-à-dire qui se déploient sur cinq volumes ou plus (en deçà, on utilise plus volontiers tri- ou tétralogie). On parle généralement de cycle quand chacun des volumes garde une pleine autonomie narrative, tout en mettant en scène des personnages de la série. On parle de roman-fleuve lorsque les volumes sont plus étroitement liés et présentent une continuité narrative suffisamment forte pour que l’ordre de lecture des volumes importe. Les Rougon-Macquart de Zola (1871-1893) ou Les Hommes de bonne volonté de Jules Romains (1932-1947) sont assurément des cycles, le roman-fleuve ayant plutôt connu son triomphe dans le premier quart du XXe siècle avec le Jean-Christophe de Romain Rolland (1904-1912), À la recherche du temps perdu de Marcel Proust (1913-1927), Les Thibault de Roger Martin du Gard (1922-1940) ou le Salavin de Georges Duhamel (1920-1932).

roman d’aventures. Catégorie de romans assez difficile à cerner (s’il est vrai que toute fiction comporte des aventures), mais qui, selon Jean-Yves Tadié, regroupe les récits « dont l’objectif premier est de raconter des aventures » comme Les Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas (1844) ou Michel Strogoff de Jules Verne (1876). L’essentiel est ce qui arrive à des personnages dénués de complexité psychologique, au fil d’une narration qui ménage le suspens. C’est pendant la seconde moitié du XIXe siècle que cette catégorie de romans connaît son apogée.

roman de chevalerie. Expression créée au xixe siècle pour désigner de façon générale les romans européens du Moyen Age et du début de la Renaissance dont les héros sont des chevaliers, quels que soient l’époque et le pays de leur composition (XIIe XVIe siècle, France, Angleterre, Italie, Espagne...). Elle n’est plus guère usitée aujourd’hui, en raison même de son imprécision (elle ne saurait définir un genre).

roman de formation. Sous-genre romanesque apparu avec le romantisme et qui utilise, en lieu et place d’une intrigue romanesque, les aléas de la biographie d’un héros, généralement de sa première jeunesse à sa maturité. Le roman de formation montre donc comment une personnalité se construit, et construit ses valeurs, dans le heurt avec la réalité et avec autrui. On dit aussi « roman d’éducation », ou Bildungsroman, l’emprunt du terme allemand signalant que le sous-genre a longtemps été perçu en France comme une spécialité d’outre-Rhin. Le roman de Goethe, Les Années d'apprentissage de Wilhelm Meister (1795-1796), demeure encore aujourd’hui le prototype du roman de formation. L'Éducation sentimentale (1869) de Gustave Flaubert est aussi un exemple abouti du genre ; mais le roman d’éducation à la française a souvent pris une forme moins ambitieuse et plus intense que ses équivalents germaniques ou britanniques : il s’agit de décrire l’épisode ou les épisodes emblématiques de la sortie de l’enfance et de l’entrée dans d’âge adulte, comme dans Le Grand Meaulnes d’Alain-Fournier (1913) ou « L’Enfance d’un chef » de J.-P. Sartre {Le Mur, 1939).

roman de mœurs. Sous-genre romanesque qui se fixe comme but premier de décrire un milieu ou un problème social dans sa complexité, le plus souvent à travers une série de portraits. On réserve l’expression pour des textes postérieurs au naturalisme. Le roman de mœurs est généralement un roman de la critique sociale, ce qui ne veut pas dire qu’il se limite à une description politisée du réel ; il propose en tout cas une vision non idéalisée du monde et fait fi de tout recours à une perspective métaphysique ou philosophique. Les romans psychologiques de Paul Bourget ou de Jacques Chardonne - qui décrivent par exemple le jeu du mariage ou du divorce dans la société — sont aussi des romans de mœurs, au même titre que les romans populistes de Charles-Louis Philippe (Bubu de Montparnasse, 1901) ou Eugène Dabit (Hôtel du Nord, 1929), qui décrivent la marginalité ou le petit peuple de Paris. roman épistolaire. Roman entièrement constitué par les lettres que s’échangent les divers personnages. Cette présentation éclatée de l’intrigue et des personnages exige parfois de véritables prouesses techniques, mais permet une gamme d’effets romanesques exceptionnelle. Les Lettres portugaises, parfois attribuées à Guilleragues (1669), sont souvent considérées comme le premier roman épistolaire important de la tradition française, même si, de fait, ce texte se prétendait véridique et ressortissait plutôt au genre des apocryphes. Tout au long du XVIIIe siècle — où il atteint son apogée -, le roman par lettres fut perçu comme un sous-genre romanesque aussi important que le roman non épistolaire. Parmi les romans par lettres les plus célèbres, on citera Julie ou la Nouvelle Héloïse de J.-J. Rousseau (1761) ou Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos (1782). On considérera parfois encore comme épistolaires des romans comme Le Lys dans la vallée de Balzac (1835), qui n’est constitué que de deux lettres, ou l'Alexis (1929) de M. Yourcenar, qui se présente comme une longue lettre-confession.


roman gothique. On nomme ainsi une veine du roman britannique qui connut son plus grand succès au tournant des XVIIIe et XIXe siècles et coïncida avec un vif renouveau d’intérêt pour le Moyen Age, qui vit notamment le succès du néogothique en architecture. L’intrigue du roman gothique associe généralement horreur et mystère fantastiques ; son décor de prédilection est celui de sombres châteaux, d’abbayes en ruine, de landes brumeuses... Parmi les romans gothiques britanniques qui ont connu le plus grand retentissement en Europe, il faut citer en premier lieu Le Château d'Otrante de H. Walpole (1764), Les Mystères d’Udolphe d’A. Radcliff (1794), Le Moine de M. G. Lewis (1796) ou Frankenstein de M. Shelley (1818). L’influence de la sensibilité gothique britannique a été contrée en France par le succès, presque contemporain, du fantastique allemand (E.T.A. Hoffmann).


roman héroïque. On désigne ainsi les grands romans de l’époque baroque qui décrivent des actions hors du commun et dont la psychologie met en scène des sentiments élevés, traits propres aux héros d’exception, dans la tradition épique. Les auteurs les plus célèbres de ce genre d’œuvres, qui ont fleuri entre 1620 et 1660 environ, sont Gomberville (Polexandre, 1632-1637), La Calprenède (Cassandre, 1642-1645, Cléopâtre, 1647-1658) et Madeleine de Scudéry (Artamène ou. le Grand Cyrus, 1649-1653, Clélie, histoire romaine, 1654-1661). L’ampleur de ces œuvres, qui s’étendent sur des dizaines de volumes, explique sans doute le succès immense qu’elles rencontrèrent, et le dédain dans lequel elles sont ensuite tombées. Le suspens créé par l’attente des suites (à la manière d’un feuilleton), la variété des personnages et les structures complexes des intrigues (début in medias res qui fait attendre l’explication de la situation, péripéties qui retardent de chapitre en chapitre l’issue attendue), enfin les genres mondains qui s’y mêlent (poésies, lettres, conversations) ont rendu ces romans très agréables à un public qui y retrouvait ses valeurs, et qui les partageait souvent par une lecture commune (dans les salons), en débattant ensuite dans ses propres conversations sur les cas amoureux et les développements de l’intrigue. La description des batailles, Faction héroïque aussi bien que les descriptions d’architectures somptueuses - évoquant parfois des édifices réels connus des lecteurs —, tout cela a séduit le public de l’âge de Louis XIII, et hantait encore la mémoire des acteurs de la Fronde (1648-1653), comme un duc de Condé ou une duchesse de Longueville. La générosité des personnages, toujours exemplaires, et la finesse des analyses sentimentales prolongent la tradition de ÏAstrée, mais dans un contexte où le genre historique (qui est le grand genre en prose) donne sa caution aux personnages tirés de l’Antiquité, même s’ils sont mis à la mode française. Si l’épopée n’a pas donné de fleurons exceptionnels à la littérature française du XVIIe siècle, son influence (via les poétiques italiennes du romanzo) a été déterminante dans la conception de ces romans à grand spectacle, dont la magie se retrouvera, en plein classicisme, sur les scènes de l’opéra.


roman historique. Roman dont la diégèse se situe dans un passé plus ou moins lointain et qui, par le biais d’une intrigue particulière, tente de faire revivre une période de l’histoire avec ses mœurs et ses aspects les plus caractéristiques. Le créateur incontesté du roman historique est l’Écossais Walter Scott (1771-1832) dont les œuvres (Ivanhoé, 1819, Quentin Durward, 1823, etc.) connurent un immense succès européen. En France, le succès de l’épopée en prose de Chateaubriand, Les Martyrs (1809), prépara cet âge d’or du roman historique que fut l’époque romantique. Différentes formules de romans historiques peuvent être distinguées : 1. selon la présence ou non d’une thèse sous-jacente (Vigny dans Cinq-Mars, 1826, défend une thèse favorable à la noblesse, P. Mérimée dans sa Chronique du règne de Charles IX, 1829, affecte de ne s’intéresser qu’à l’anecdote) ; 2. selon la répartition des rôles entre personnages fictifs, milieu collectif et grandes figures de l’histoire (comme W. Scott, Balzac dans Les Chouans, 1829, maintient celles-ci au second plan, contrairement à ce qui deviendra la pratique d’Alexandre Dumas, maître du genre) ; 3. selon l’ampleur de la reconstitution : avec Notre-Dame de Paris (1831), V. Hugo tient à faire revivre tout le Moyen Age finissant ; les tableaux de la monarchie anglaise dans L’Homme qui rit (1869), de la Révolution française dans Quatrevingt-treize (1874) seront plus resserrés ; Flaubert dans Salammbô (1862) tente de ressusciter toute la civilisation carthaginoise, Hérodias (Trois contes, 1877) n’est qu’un épisode de l’histoire biblique.
L’amalgame du roman d’aventures et du roman historique, réalisée par Alexandre Dumas dans Les Trois Mousquetaires (1844), donne naissance au roman «de cape et d’épée », dont la veine nourrira nombre de romans-feuilletons comme Le Bossu de Paul Féval (1857) ou la série des Pardaillan de Michel Zévaco (1860-1918). Après une période de déclin, le roman historique a connu un renouveau dans la seconde moitié du XXe siècle. En témoignent, entre autres, le cycle d’Angelo de Jean Giono (Le Hussard sur le toit, 1951, Le Bonheur fou, 1957, Angelo, 1958), la série à succès de Maurice Druon, Les Rois maudits (1955-1960), le roman de Marguerite Yourcenar, L’Œuvre au noir (1968), les romans de Jeanne Bourin (La Chambre des dames, 1979) ou encore la saga de Robert Merle, Fortune de France, commencée en 1977.

roman noir. L’expression est employée pour désigner certains romans français de la fin du XVIIIe siècle qui reprenaient l’esprit du roman gothique britannique (Coe-lina, ou l’enfant du mystère de Ducray-Duminil, 1798, par exemple) et dont le succès se prolongea sous l’Empire et la Restauration. Elle est aussi maintenant très fréquemment utilisée pour désigner un sous-genre du roman policier, caractérisé par des choix narratifs qui insistent plus sur le crime que sur l’enquête, sur le criminel plus que sur l’enquêteur, et par des choix thématiques et esthétiques qui tendent à donner une vision sordide de la société et des hommes. La violence et le sensationnalisme du roman noir français le rapprochent du thriller anglo-saxon.


roman pastoral. Autre avatar du genre pastoral protéiforme durant près d’un siècle, entre la seconde moitié du XVIe siècle et les années 1650, le roman pastoral met à son tour en scène des bergers et des bergères, dans un espace idyllique, où la nature prend les traits traditionnels du locus amoenus légué par la bucolique antique. L’intrigue consiste le plus souvent en amours contrariées, et le dénouement, comme sur la scène théâtrale, est en général l’union des couples longtemps séparés par des aventures diverses (quiproquos, jalousie imméritée, déguisement, etc.). Le modèle du genre, inspiré des sources italiennes (Arcodia de Sannazar) ou espagnoles (Diana de Monte-mayor), voire anglaises (Arcadia de Sidney), est, en France, l'Astrée d’Honoré d’Urfé, qui paraît entre 1607 et 1619. Il est aussi influencé par le roman grec, remis à la mode par les traductions d’Amyot (Daphnis et Chloé de Longus), et il fait la synthèse d’un néoplatonisme diffus, où l’amour, dans la tradition philosophique du Banquet de Platon, tient une place centrale : la quête de Céladon, séparé de la bergère Astrée dès le début du roman, devient donc une sorte de quête initiatique. Le mélange des genres (lettres insérées, poèmes), l’économie de la narration (par séquences assez brèves, de la longueur d’une nouvelle en fait) expliquent sans doute l’immense succès de l’œuvre durant une bonne partie du siècle : la pastorale dramatique, mais aussi la critique romanesque (Le Berger extravagant de Sorel) continueront de jouer sur les thèmes, les personnages et les décors de cette œuvre maîtresse dont le principal mérite est d’avoir fait sortir du plus pur héritage humaniste un des genres les plus féconds de la modernité littéraire.

roman picaresque. Type de roman apparu en Espagne avec la publication anonyme du Lazarillo de formes (1554), où le narrateur raconte à la première personne ses nombreuses aventures sans souci de les relier. Au sens étroit, le picaro désigne un gueux, mais l’on nomme romans picaresques les œuvres construites sur une suite d’épisodes plus ou moins liés ; le héros, habile à se tirer d’embarras, rusé et sans scrupules, y mène, à la marge de la société, une vie d’aventurier où le hasard joue son rôle. Bien que le protagoniste soit un gentilhomme, l’Histoire comique de Francion (1623), due à Charles Sorel, est proche du picaresque par l’enchaînement varié de ses nombreux épisodes. Mais c’est surtout Lesage qui, avec son Gil Blas de Santillane (1715-1735), offre la meilleure illustration du genre : le héros-éponyme, déraciné et profiteur, y raconte avec détachement ses aventures espagnoles, les bonnes et les mauvaises fortunes que le destin tour à tour lui ménage.

roman policier. Sous-genre romanesque dont l’intrigue est constituée par une enquête policière provoquée par un ou plusieurs crimes. La construction d’un tel roman est souvent stéréotypée, ce qui a conduit à considérer que la plupart des romans policiers relèvent de la paralittérature. Le genre a pourtant produit nombre de chefs-d’œuvre incontestables depuis le début du XIXe siècle. On retiendra, parmi les grands maîtres du roman policier de langue française, Emile Gaboriau (1832-1873 ; peut-être le créateur du genre), Maurice Leblanc (1864-1941), ou Georges Simenon (1903-1989). Dès le XIXe siècle, les romans policiers ont tendu à former des cycles centrés sur la figure d’un enquêteur.

roman populaire. Bien qu’elle manque de rigueur, la catégorie du roman populaire s’est peu à peu dégagée au cours du XIXe siècle à partir du succès de ce que Sainte-Beuve dénonçait dès 1839, à propos de Balzac, Dumas et Frédéric Soulié, comme « la littérature industrielle ». Le roman populaire se définit avant tout par le nombre de ses lecteurs. Sa diffusion, d’abord limitée aux cabinets de lecture, devient un phénomène de masse à partir de 1836 grâce au feuilleton, puis aux livraisons illustrées et aux collections à bon marché. Ces moyens de diffusion retentissent sur la production : à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, des écrivains se spécialisent dans la fabrication accélérée de romans à succès. Après les romans d’inspiration historique ou sociale de l’époque romantique, les débuts de la IIIe République voient la vogue de romans mélodramatiques et sentimentaux tels que La Porteuse de pain de Xavier de Montépin (1823-1902), Roger la Honte de Jules Mary ou Le Maître de forges de Georges Ohnet (1848-1918). Renouant avec la veine des Exploits de Rocambole de Ponson du Terrail (1829-1871) sous le Second Empire, les romanciers populaires du début du XXe siècle mettent en circulation des personnages comme le mystérieux docteur Cornélius (Gustave Le Rouge), Arsène Lupin (Maurice Leblanc), le criminel Fantômas qui fera la joie des surréalistes (Marcel Allain et Pierre Souvestre), le reporter Rouletabille ou le bagnard Chéri-Bibi (Gaston Leroux). D’autres préféreront exploiter l’exotisme (Louis Boussenard), la veine de l’anticipation aux confins du fantastique (Maurice Renard) ou plus récemment celle de l’espionnage (Jean Bruce, Gérard de Villiers).


roman psychologique. Roman essentiellement consacré à l’analyse de la personnalité, des sentiments, de l’évolution intérieure d’un ou plusieurs personnages, le plus souvent décrits dans un moment de crise morale. On considère parfois ce sous-genre comme particulièrement français ; parmi les chefs-d’œuvre les plus représentatifs



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