SEGALEN Victor 1878-1919

Poète, né à Brest. Médecin à bord d'un navire militaire, il découvre la Polynésie; d'où son premier livre, Les Immémoriaux (1907), étonnante effusion lyrique qui se présente à nous comme le simple récit d'un conteur indigène. Les voyages seront désormais sa passion et c'est en qualité d'archéologue qu'il se rend de 1910 à 1913 en Chine et au Tibet, qui lui inspirent Les Stèles (1912) ; poèmes en versets somptueux dont le débit seul, mais non pas le ton - plus interrogatif qu'affirmatif -, se souvient des premiers exemples de Claudel et de Saint-John Perse. Parallèlement, il rédige un travail archéologique (posthume) sur L’Art funéraire à l'époque des Han. Au total, ce qu'est allé chercher ce Celte dans le passé des peuples polynésiens ou chinois, ce n'est certes pas une saveur d'exotisme, ce sont bien plutôt les manifestations, les signes extérieurs, d'une mentalité pour lui lointaine, étrange. Comme si de cette révélation, venue très vite, et de très loin, il attendait un choc ; ou encore: une jouissance nouvelle (ne nous affirme-t-il pas qu'il en déguste la distance?). Il meurt - par accident, suicide, ou simple épuisement - au pied d'un arbre de sa forêt bretonne d'Huelgoat. Après la mort du poète, la publication des Odes (1926) rouvre le dossier Segalen. Cet écrivain curieux, mais si discret qu'il put passer toute sa vie pour un amateur, apparaît de jour en jour comme une des voix les plus personnelles de la poésie moderne.