Cours sur Le Sang des Promesses - Mouawad
Publié le 12/05/2024
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Le Sang des Promesses - Mouawad
Littoral 1999 - Incendies 2003 - Forêt 2006 - Ciels 2009
—> Construit comme un opéra
—> Les quatre éléments avec lesquels on crée un cosmos : œuvre littéraire comme
lieu pour être
Manières littérale et métaphorique à l’eau, au feu, à la terre et au ciel = univers
cohérent qui donne à voir une poésie contemporaine (= Racine) de l’ordre de la
convulsion, beauté convulsive (destruction et création / l’horreur et la douleur;amour)
TITRE :
-sang, symbole de la cruauté, pormesses qui font couler le sang (gage de cruauté
dans les relations humaines à travers les générations) ; le fait de ne pas tenir ses
promesses (quête de Nawal est de faire tenir les promesses)
-sang, ce qui lie les quatre pièces, filiation et quête d’origine
-promesses qui se transmettent à l’intérieur des familles (Incendies, bagage culturel
légué par la grand-mère que Nawal perpétue)
-sang est ce qui fait vivre les promesses
—> La promesse dans le théâtre de Mouawad est l’envers de la malédiction, sa
forme moderne
Point d’inversion avec la tragédie antique : la mort se trouve ici au début, c’est le
point de départ (sortir du tragique)
« Je réalisais que si Littoral était l’histoire d’un fils devant son père, Incendies était
celle d’une fille devant sa mère.
La forme des deux spectacles me donnait l’impression
d’une continuité dans l’idée d’un théâtre de récit, épique et tragique.
Alors, comme
Incendies était le feu et Littoral, l’eau, je me suis amusé à imaginer la terre et l’air, ce
qui a donné naissance à cette impression de tétralogie qui, avec Forêts, s’est
confirmée.
»
Épique : épopée = récit
Tragique : théâtre
Les artifices relèvent de l’ingeniosité narrative et non des effets spéciaux
Chapitre 19 : scène du bus / scène de guerre - historique
Violence qui n’en finit pas qui prend place dans « les pelouses de banlieue » = la
tranquilité, le calme, la famille, créer l’effet de surprise
Lebel (même rôle que Tyrésias) = narrateur extradiégétique aux jumeaux ; Nawal =
narratrice intradiégétique
Présence des marteaux piqueurs dès les didascalies, la tranquilité est menacée, c’est
par le son que Mouawad ouvre une brèche (une nekuia comme dans l’Odyssée) =
paratopie
Le temps est disjoint (Hamlet - Shakespeare « The time is out of joint »), problème
dans la généalogie, retour possible au chaos.
Théâtre de texte traversé par la poésie
Mouawad disait que la langue politique peut être récupérée, il préfère la langue
poétique, celle du détour (télé).
Le Sang des Promesses confronte la guerre, la violence, l’importance de connaître son
histoire pour trouver sa place dans l’Histoire.
Héros récalcitrant (=Simon), héros qui
se crispent, se révoltent contre les générations précédentes, ils creusent le passé,
déterrent le silence (=Jeanne), les amours misent à mal par la famille, la violence.
NE PAS DÉSESPÉRER MALGRÉ CE CONSTAT : « consoler notre époque », il y a une
issue grâce à la consolation par l’union, la communion et l’amitié (les conflits seront
toujours là)
Nietzsche « croyons a notre amitié stellaire meme si nous devons être sur terre des
ennemies »
La tétralogie tisse et entrelace le collectif et le prive, l’intime et l’histoire (souvent la
guerre) : Comment faire pour être à la fois heureux personnellement et malheureux
collectivement ? Pour à la fois faire partir d’une communauté mais aussi être libre
dans sa propre histoire.
Elle constitue un véritable opéra, quatuor, qui renoue avec la tradition des aèdes des
antiques tout en étant contemporain puisqu’il inverse les codes tragiques.
On peut qualifier ces quatre pièces d’épopée de l’humanité poursuivie par les
protagonistes.
On explore les limites de l’humanité, la mesure de l’homme et ce qui est monstrueux.
Jamais les lieux/guerres ne sont nommés, tout est métaphorique.
Il s’agit de la
Guerre.
Échos de la guerre du Liban mais aussi de la Première et Seconde Guerre
Mondiale, la guerre du Bosnie, la guerre du Rwanda et la guerre de Cent Ans.
Les
guerres se parlent.
Il s’agit de montrer le lien entre l’horreur (inceste, viol, carnage)
et l’amour.
Les pièces constituent un testament de l’humanité montrant ce que
l’humanité nous donne de plus beau et de plus insoutenable.
L’inhumanité est
humaine.
Apothéose du bien et du mal, on ne ressort pas indemne du spectacle de
Mouawad (répulsion, consolation = sentiments humains), théâtre qui dérange, nous
perturbe.
Exploration des limites de l’humain.
Comme dans l’Odyssée le voyage entrepris par les protagonistes est périlleux, difficile,
il y a toujours un dénouement saisissant.
Il y’a des aventures à la fois antiques et
contemporaines : sniper, terroristes, utopistes = formes modernes de la violence en
réécriture.
Sniper = armes de la guerre (Iliade), l’arme poussée à sa technologie la plus poussée,
tirer de loin (arme de loin, de lâcheté).
Caractérisé par la vue, le super voyant qui est
super aveugle.
Utopistes = un mythe, péché originel, remplacé par les utopies.
Point commun, ce
sont des fictions mais ils s’opposent, le mythe renvoie dans le passé tandis que
l’utopie dans le futur.
Les quatre pièces présentent une tragédie moderne.
Il réécrit les tragédies.
Par
exemple, la réécriture de l’histoire d’Œdipe, dans Littoral on a l’histoire du cadavre,
les oiseaux lui déchirant la chaire, le deus ex machina, oracle avec « c’est sûr… »,
quête des origines.
Aporie présente à travers le polygone dont on a perdu le tracé,
situation inexplicable (énigme comme pour Œdipe) qui est aussi montré par le silence
(lettres = sortie de l’aporie tragique).
Histoire racontée à un fils éloigné de sa mère sur la plan physique et
psychologique, origine doublement éloignée de la même manière que Œdipe était très
eloigné de son père.
D’ordinaire les tragédies s’appuient sur le mythe, ici il est remplacé par l’histoire.
Mythème : selon Lévi-Strauss, ce qui reste du mythe, commun à l’humanité.
La quête des origines passe par l’anagnorisis, reconnaissance qui passe par des
objets ou des signes (nez de clown, métonymie du spectacle, du théâtre).
Ce n’est
pas un passage du bonheur au malheur mais sur l’humanité et la possibilité d’un
avenir commun.
Silence, symbole de la page vierge à écrire, invitation à remplir cet espace vide
pour le combler de parole.
L’origine n’est rien sans l’écriture, transformer le sang en encre.
Être ensemble dans la même pièce = être ensemble au théâtre = même humanité
Il y a également un emprunt à d’autres formes d’art : La musique avec notamment un
héritage et un lien avec la mère (femme qui chante), cela tisse les liens familiaux
disjoints.
Le cinéma avec les procédés (split screen) et avec Voyeur de Michael Powell
(réécriture).
La langue est utilisée comme matériau sonore (présence de l’arabe, de français,
d’anglais et de français-québécois).
Ces langues se superposent pour faire entendre
toutes les voix du monde, mondialisation, rumeur du monde (point culminant dans
Ciels) : comment sortir de Babel ?
Puis il y a le silence, quand on a perdu sa langue.
Mère d’Œdipe se suicide par
pendaison, corde = perte de parole.
Incendies = paratopie
Enjeu : maïeutique, accouchement à la vérité
Univers kafkaïen
ÉTUDES SCÈNES 14-15 :
Troisième scène de « l’acte I : Incendies de l’enfance »
Deux scènes non dissociables (alphabet présent dans les deux) ;
scène agonistique qui se termine par les insultes (comme un échange de coups) avec
l’insertion du dialogue de l’alphabet (apprentissage).
Figure maternelle de Nawal (apprendre à parler = l’un des premiers apprentissages
par la mère).
Retour en arrière dans la scène (aporie du langage, régression au stade
anale), les insultes sont l’aspect le plus primitif du langage (arme) ; maternité
inversée avec le walk-man et les respirations (échographie).
Remonté totale dans le temps - jusqu’avant leur naissance - fonction maïeutique du
conflit.
« T’es mon frère pas mon père » « c’est pareil » Simon a la vérité, fonction
épiphore sur « pareil » pour enfoncer le clou pour montrer que Simon laisse malgré lui
inconsciemment une vérité.
Notaire-Notare = faire des signes qu’il a donné dans les
testament.
« Un et un font deux » ici ils font un, la mathématicienne se trompe.
—> Écriture en grec « graphe » (théorie des graphes, scène qui est sa correction,
épanorthose de la scène 3)
l’écoute a une valeurs performative/obéissance/conseil - ici ouïe et littérature (qui
est plus efficace, retournement de la doxa) ; invitation à apprendre une langue, faire
des mots avec des lettres comme Epicure au IIIème siècle (mots deviennent des
armes)
le frère et sa sœur sont dans le même espace mais séparé (scène 3 : corps et
esprit et ici pour se faire rencontrer deux espaces, l’appartement et une route, deux
époques).
Simon commence à parler de sa mère au présent puis au passé/imparfait
(confusion).
Le théâtre est un lieu de paratopie
Mouvements :
I.
Jusqu’à « Simon viens t’assoire à côté de moi… » = progression
II.
Valeurs du silence, silence parlant de Nawal qui permet de faire apparaître sa voix
du passé - Jusqu’à « Simon s’en va »
III.
Ils sont désunis, structure agonistique qui....
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