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Aldous Huxley

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Les premiers ouvrages d'Aldous Huxley sont marqués par un pessimisme notoire. A l'instar de Jonathan Swift, Huxley éprouvait à l'égard du corps en général, et de l'attrait sexuel en particulier, une invincible répugnance. "Swift, a-t-il écrit, n'a jamais pu pardonner à l'homme d'être à la fois un mammifère vertébré et une âme immortelle" ; et ces lignes pourraient s'appliquer aussi bien à leur auteur qu'à Swift. Huxley semble se complaire avec une sorte de masochisme dans les descriptions écoeurantes ­ la plus atroce d'entre elles étant la scène d'Eyeless in Gaza, dans laquelle un chien tombé d'un avion sur un toit en terrasse éclabousse deux amants nus de sang et de chair déchiquetée. Mais le pessimisme de Huxley n'est pas uniquement le fait du dégoût physique. Fasciné par la science moderne, il savait trop bien que plus s'étend le domaine de nos connaissances et plus il devient difficile de croire aux valeurs humaines. Notre conception de la réalité supérieure dépend du fonctionnement de nos glandes ; notre affectivité, qui fait de chacun de nous un être unique en son genre, est due à des causes d'ordre physiologique ; une intervention chirurgicale au cerveau est peut-être susceptible de modifier du tout au tout la personnalité d'un homme. Les valeurs sont-elles donc dépourvues de sens ? Tout ce qui caractérise un individu serait-il donc purement et simplement le résultat d'un événement fortuit ? Ces problèmes, Huxley les aborde à maintes reprises dans ses satires ; et c'est seulement au cours des années 1930, lorsqu'il sera attiré par le mysticisme, qu'il pourra leur trouver une réponse.

« Aldous Huxley Les premiers ouvrages d'Aldous Huxley sont marqués par un pessimisme notoire.

A l'instar de Jonathan Swift, Huxley éprouvait à l'égard du corps en général, et de l'attrait sexuel en particulier, une invincible répugnance.

"Swift, a-t-il écrit, n'a jamais pu pardonner à l'homme d'être à la fois un mammifère vertébré et une âme immortelle" ; et ces lignes pourraient s'appliquer aussi bien à leur auteur qu'à Swift. Huxley semble se complaire avec une sorte de masochisme dans les descriptions écoeurantes la plus atroce d'entre elles étant la scène d'Eyeless in Gaza, dans laquelle un chien tombé d'un avion sur un toit en terrasse éclabousse deux amants nus de sang et de chair déchiquetée. Mais le pessimisme de Huxley n'est pas uniquement le fait du dégoût physique.

Fasciné par la science moderne, il savait trop bien que plus s'étend le domaine de nos connaissances et plus il devient difficile de croire aux valeurs humaines.

Notre conception de la réalité supérieure dépend du fonctionnement de nos glandes ; notre affectivité, qui fait de chacun de nous un être unique en son genre, est due à des causes d'ordre physiologique ; une intervention chirurgicale au cerveau est peut-être susceptible de modifier du tout au tout la personnalité d'un homme.

Les valeurs sont-elles donc dépourvues de sens ? Tout ce qui caractérise un individu serait-il donc purement et simplement le résultat d'un événement fortuit ? Ces problèmes, Huxley les aborde à maintes reprises dans ses satires ; et c'est seulement au cours des années 1930, lorsqu'il sera attiré par le mysticisme, qu'il pourra leur trouver une réponse. Des premiers romans de Huxley, Crome Yellow (1921), Antic Hay (1923) et Those Barren Leaves (1925), se dégagent une frivolité et une amertume caractéristiques de leur époque.

Bien qu'âgé de vingt ans au début de la guerre de 1914-1918, Huxley avait été jugé inapte au service armé en raison de sa mauvaise vue.

Il fut presque aveugle des années durant, et souffrait continuellement de fatigue oculaire, même en portant des lunettes.

Les horreurs de la guerre, jointes à sa propre infirmité, firent de lui un quasi-misanthrope.

Il ne faudrait pas cependant considérer Huxley comme un cynique.

Le mépris qu'il professe à l'égard de l'espèce humaine est celui d'un moraliste.

Il en veut à la société dans laquelle il vit parce que la dégradation de celle-ci révolte son intransigeante honnêteté.

Le cynisme, les attitudes négatives l'indisposent, ainsi qu'en témoigne sa façon de traiter, dans Antic Hay, le caractère de Coleman.

Plus tard, il exprimera dans son oeuvre sa sympathie à l'égard des opprimés et des laissés-pour-compte. Crome Yellow est un roman d'idées satiriques dans la tradition de l'écrivain du début du XIXe siècle Thomas Love Peacock.

Plus enjouée et plus exubérante que les précédentes, c'est une oeuvre empreinte d'une ironie de bon aloi et coupée d'interludes fantastiques où domine la farce.

L'intrigue en est mince, la psychologie des personnages assez superficielle.

Son intérêt réside dans la satire des hommes et des idées.

Antic Hay et Those Barren Leaves sont des oeuvres plus violentes dans l'expression du désespoir.

Theodore Gumbril, le maître d'école désabusé d'Antic Hay, a une conscience aiguë de l'existence de deux dieux, l'un parlant au coeur et l'autre à la raison, qu'il s'efforce en vain de concilier. Ce problème est celui de Huxley.

Sa vie affective, si importante en ce qu'elle le singularise des autres humains, lui apparaît absurde dès qu'il en vient à considérer le fondement physiologique sur lequel elle repose.

Gumbril, à l'instar de maint personnage de Huxley, échappe à ce dilemme en menant une vie extravagante et frénétique.

Et toute la vie de Huxley lui-même n'est qu'un long et pénible effort en vue de combler le fossé qui sépare l'âme du corps. Durant les années 1920, Huxley se lia d'amitié avec D.H.

Lawrence, dont les idées exercèrent sur lui une grande influence.

"L'homme est un, affirmait Lawrence, corps et âme, et les éléments qui le composent ne sont point ennemis." Frappé par le génie de Lawrence, Huxley s'acharna vainement à comprendre le point de vue de son ami.

Mais il finit par le rejeter dans Point Counterpoint (1928).

La structure de ce roman, extrêmement complexe, est en partie inspirée des Faux Monnayeurs d'André Gide.

S'efforçant d'imiter le dessin musical du contrepoint, Huxley passe sans transition du présent au passé, d'une intrigue à l'autre, de manière à créer chez le lecteur l'illusion d'assister à plusieurs aspects simultanés d'une même expérience.

Chaque personnage est comme un instrument de l'orchestre, chacun toutefois exécutant son propre thème "à la fois juste et faux, sans se soucier de l'ensemble".

La structure décousue du roman illustre la conception que se fait Huxley de la société moderne.

Chaque individu agit conformément à ses propres désirs, sans se préoccuper des autres.

Il n'est pas de croyances ou de devoirs communs susceptibles de conserver à la société sa cohésion. Après Point Counterpoint, Huxley publia successivement Brave New World (1932), Eyeless in Gaza (1936) et After Many a Summer (1939). Ces romans reflètent tous le dégoût de leur auteur devant la corruption de notre société décadente.

Brave New World est peut-être l'oeuvre la plus célèbre d'Aldous Huxley.

Ce roman d'anticipation brosse le tableau utopique d'une civilisation totalitaire et mécanisée.

Les hommes de ce monde nouveau mènent une vie confortable et prospère, mais ils ont perdu tout ce qui faisait d'eux de véritables êtres humains.

Surgi du fond de sa réserve mexicaine, le Sauvage se répand en invectives contre la stérilité de ce monde impersonnel.

"Mais votre confort, je n'en veux pas ! s'écrie-t-il, ce que je veux, c'est Dieu, c'est la poésie, c'est le vrai danger, c'est la liberté, c'est la bonté, c'est le péché." Huxley, toutefois, ne nous permet pas de nous rallier avec trop de complaisance aux vues du Sauvage.

Mustapha Mond, se faisant l'avocat du "meilleur des mondes", rétorque au Sauvage qu'il réclame le droit de souffrir de la maladie, de mourir de faim, d'éprouver la peur, de succomber à des tentations dégradantes.

S'il refuse la mécanisation de la société, l'homme se trouvera à nouveau en butte aux souffrances décrites par Huxley dans ses précédents ouvrages. Dans la préface qu'il a publiée en 1946 pour Brave New World, Huxley affirme que, s'il lui fallait récrire son roman, il y introduirait une nouvelle alternative pour l'espèce humaine : une petite collectivité continuerait à s'efforcer d'atteindre "la connaissance unitive du Tao ou Logos immanent, de la Divinité transcendante ou brahmane".

Le mysticisme religieux qui s'était manifesté chez lui durant les années 1930 et 1940 est évoqué dans des oeuvres telles que The Perennial Philosophy (1945), The Devils of Loudun (1952), The Doors of Perception (1954) et Heaven and Hell (1956).

Le genre de mysticisme qui attire Huxley est celui pour lequel Dieu n'est pas une personne, mais un Esprit universel dont nos individualités éphémères sont l'expression et dans lequel elles sont appelées en dernier lieu à se confondre.

L'oeuvre romanesque de Huxley dénonce aujourd'hui encore, à mainte reprise et avec violence, la société moderne ; et, dans Ape and Essence (1948), il dépeint les effroyables excès auxquels donnerait lieu une guerre atomique.

Son roman le plus récent, Island (1962), est une peinture de la société idéale telle qu'il la conçoit société dans laquelle les êtres humains peuvent se réaliser pleinement dans un milieu intelligemment organisé.

Mais à la fin de l'ouvrage, le monde extérieur intervient, détruisant cette utopie.

Bien que ses idées aient évolué avec le siècle, Huxley n'a jamais nourri beaucoup d'espoir en ce qui concerne l'avenir de la civilisation.. »

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