Avant de lire une oeuvre littéraire, de voir une émission de télévision, de choisir un spectacle, vous paraît-il utile de consulter un ou plusieurs articles critiques ?
Extrait du document
«
[Introduction]
Alexandre Dumas remet la critique en question.
Etymologiquement - le mot vient d'un verbe grec qui signifie «juger » -, faire la
critique d'une œuvre c'est en dire les qualités comme les défauts sans, bien entendu, le moindre parti pris.
Doit-on, pour autant, s'en remettre à la critique, avant de lire une œuvre, de regarder un spectacle ou une émission de télévision ?
Cela paraît contraire à la liberté du lecteur ou du spectateur.
La critique peut, pourtant, être d'un grand secours, surtout quand le choix
est ample et difficile mais l'usager se doit d'exercer, en dernier recours, le choix final.
[I.
Que faire de la critique ?]
[1.
La liberté du public]
Je n'aime guère me faire dicter mon choix.
Choisir mes émissions de télévision, mes spectacles au cinéma ou au théâtre, me semble
être du ressort de ma liberté personnelle.
Cela me paraît d'autant plus évident que le plaisir d'une lecture ou d'un spectacle est
toujours, pour moi, synonyme de temps libre.
Que mon travail me soit imposé par nécessité, soit, mais que le « seigneur Critique » se
mêle de régenter mon temps de loisir, c'en est trop.
[2.
La liberté de l'auteur]
Je supporte d'autant moins les incursions de la critique, qu'elles soient imprimées, radiophoniques ou télévisuelles, qu'elles me
semblent attenter non seulement à ma propre liberté mais aussi à celle de tout créateur.
« La critique est aisée mais l'art est difficile.
»
La maxime est d'autant plus vraie que l'art est synonyme de liberté.
Dire ce qu'il faut créer c'est nier cette liberté.
Dire ce qu'il faut lire
ou regarder c'est l'empêcher de s'exprimer.
[3.
Des goûts et des couleurs]
« Des goûts et des couleurs on ne discute point », dit un autre adage bien connu.
Consulter des articles de critique avant de choisir
mon livre ou mon spectacle serait me conformer aux goûts et aux couleurs de Monsieur X ou Madame Y sous prétexte qu'ils sont
critiques.
Si faire de la critique signifie exercer son jugement, je prétends être assez grand pour le faire moi-même.
Descartes me
donne absolument raison puisqu'il affirme que « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ».
Si telle est mon intime conviction - et je ne la renierai pas un seul instant !» - il n'en demeure pas moins que, de nos jours bien plus
que du temps d'Alexandre Dumas, la complexité du choix est grande.
[II.
Fonction du critique]
[1.
Information]
C'est ainsi que je prendrai volontiers les critiques et leurs articles non pour des guides de conscience mais pour des guides tout court.
Comment, en effet, choisir dans la masse de ce qui se produit aujourd'hui sur les ondes, les écrans, les scènes, le papier imprimé ? Il
faut au moins quelque répertoire, quelque programme, quelque revue, spécialisée ou non, pour savoir où se trouve l'œuvre susceptible
de me plaire, me délasser, me distraire, pour connaître de horaire de telle émission intéressante...
[2.
Sélection]
Il me faut encore quelque indication sur la qualité, le genre, le thème, le style des œuvres, les acteurs d'une pièce ou d'un film, tous
éléments que je ne peux, non plus, deviner sans le recours de journaux et des revues spécialisées.
Je ne consens absolument pas à
abdiquer ma liberté de jugement mais j'ai besoin, disons d'une « assistance technique », de recueillir les éléments nécessaires à sa
formation.
[3.
Le choix]
Les articles des experts me mettent ainsi en mesure d'exercer mon choix final.
Je ne cache pas qu'ils peuvent même me faire
découvrir des œuvres dont je n'aurais jamais, sans eux, soupçonné l'existence.
Si je n'admets en aucune manière qu'ils m'imposent
leur choix, je reconnais volontiers que je leur dois souvent le plaisir et la découverte.
Le lecteur ou le spectateur doit toujours rester le maître.
[III.
La décision finale]
[1.
Une simple indication]
Mais ce maître a, très souvent, besoin d'une indication pour exercer son choix.
Un article de critique peut le mettre sur la voie de ce
qu'il cherche, lui donner l'occasion de satisfaire sa curiosité intellectuelle ou son plaisir.
[2.
Un prétexte]
L'article de critique peut aussi constituer le prétexte d'une découverte, source, très souvent, de grande satisfaction pour l'esprit...
Le
lecteur peut découvrir tout un monde au hasard d'un article de journal présentant telle œuvre romanesque totalement inconnue
jusque-là.
Le simple programme de télévision, présentant un film ou une émission en quelques mots, peut encore nous faire découvrir
quelque occasion unique d'apprendre ou de rêver...
[3.
Une décision personnelle]
En tout état de cause la décision appartient à l'individu, qu'il soit spectateur ou lecteur.
Il appartient au domaine inaliénable de sa
liberté personnelle.
Que son choix s'exerce après une longue réflexion, nourrie de la lecture de quelques articles sérieux et
documentés, qu'elle s'exerce sur un simple « coup de tête » à la lecture d'un entrefilet vaguement aperçu, elle lui appartient.
[Conclusion]
Qu'elle ait simplement facilité l'accès à une œuvre en signalant l'existence, qu'elle ait véritablement invité à un art le spectateur ou
lecteur potentiel, la critique aura rempli son rôle, pourvu seulement qu'elle soit, comme le veut Alexandre Dumas, juste, complète,
objective et qu'elle joue un rôle « pédagogique »..
»
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