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Catulle MENDÈS (1841-1909) (Recueil : Soirs moroses) - Spleen d'été

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Catulle MENDÈS (1841-1909) (Recueil : Soirs moroses) - Spleen d'été L'orageux crépuscule oppresse au loin la mer Et les noirs sapins. L'ombre, hélas ! revient toujours. Ah ! je hais les désirs, les espoirs, les amours, Autant que les damnés peuvent haïr l'enfer. Car je n'étais point né pour vivre : j'étais né Pour végéter, pareil à la mousse ou pareil Aux reptiles, et pour me gorger de soleil Sur un roc d'un midi sans trêve calciné. Aux plantes contigu, voisin de l'animal, Famélique sans crainte et repu sans remord, Je n'aurais pas connu ce que c'est que la mort ; Mais, je vis ! et je sais qu'il est un jour fatal. Le soir qui m'avertit, lugubre et solennel, Que d'un soleil éteint le temps est plus âgé, Accable abondamment mon coeur découragé Du dégoût d'un bonheur qui n'est pas éternel. Ô pins ! comme la nuit fonce vos mornes deuils ! La cigale avec ses grêles cris obsédants Fait le bruit d'une scie aux innombrables dents Dans l'arbre détesté dont on fait les cercueils.

« Catulle MENDÈS, Soirs moroses, « Spleen d'été ». 1.

L'orageux crépuscule oppresse au loin la mer 2.

Et les noirs sapins.

L'ombre, hélas ! revient toujours. 3.

Ah ! je hais les désirs, les espoirs, les amours, 4.

Autant que les damnés peuvent haïr l'enfer. 5.

Car je n'étais point né pour vivre : j'étais né 6.

Pour végéter, pareil à la mousse ou pareil 7.

Aux reptiles, et pour me gorger de soleil 8.

Sur un roc d'un midi sans trêve calciné. 9.

Aux plantes contigu, voisin de l'animal, 10.

Famélique sans crainte et repu sans remord, 11.

Je n'aurais pas connu ce que c'est que la mort ; 12.

Mais, je vis ! et je sais qu'il est un jour fatal. 13.

Le soir qui m'avertit, lugubre et solennel, 14.

Que d'un soleil éteint le temps est plus âgé, 15.

Accable abondamment mon coeur découragé 16.

Du dégoût d'un bonheur qui n'est pas éternel. 17.

Ô pins ! comme la nuit fonce vos mornes deuils ! 18.

La cigale avec ses grêles cris obsédants 19.

Fait le bruit d'une scie aux innombrables dents 20.

Dans l'arbre détesté dont on fait les cercueils. Catulle Mendès (1841-1909) : Poète, dramaturge, romancier, Mendès est emblématique du style « fin de siècle » et est un des dignes héritiers du courant romantique.

Inspiré par Théophile Gautier, Lecomte de Lisle et Richard Wagner dont il a encouragé la découverte (L'Œuvre wagnérienne en France), Mendès fut un auteur très productif dont les œuvres furent très bien reçues tant par le public que par les critiques. Mendès joua un rôle considérable dans la publication de la poésie parnassienne et symboliste et dans la diffusion de la littérature naturaliste.

Il fut le catalyseur de plusieurs courants littéraires parfois opposés : Parnasse, Symbolisme, Naturalisme, Décadence... « Spleen d'été » : • Poème composé de 5 quatrains. • 20 alexandrins. • Disposition des rimes : rimes embrassées, du type ABBA. • « Spleen » > renvoie à la poésie de Baudelaire… Commentaire linéaire, strophe par strophe. Strophe 1. • 2 premiers vers > description d’un paysage. Paysage oppressant. Ex : « L'orageux crépuscule oppresse au loin la mer ». - Allitération en [r] avec « orageux ; crépuscule ; oppresse ». - Allitération en [s] avec « crépuscule oppresse »… => Sonorités qui traduisent cette oppression. « Orageux » > lourd, inquiétant.. »

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