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Corneille, L'Illusion comique, acte V, scène 5

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Corneille, L'Illusion comique, acte V, scène 5. (…) Alcandre Cessez de vous en plaindre. A présent le théâtre Est en un point si haut que chacun l'idolâtre; Et ce que votre temps voyait avec mépris Est aujourd'hui l'amour de tous les bons esprits, L'entretien de Paris, le souhait des provinces, Le divertissement le plus doux de nos princes, Les délices du peuple, et le plaisir des grands; Il tient le premier rang parmi leurs passe-temps; Et ceux dont nous voyons la sagesse profonde Par ses illustres soins conserver tout le monde, Trouvent dans les douceurs d'un spectacle si beau De quoi se délasser d'un si pesant fardeau. Même notre grand roi, ce foudre de la guerre Dont le nom se fait craindre aux deux bouts de la terre, Le front ceint de lauriers, daigne bien quelquefois Prêter l'oeil et l'oreille au Théâtre-François: C'est là que le Parnasse étale ses merveilles; Les plus rares esprits lui consacrent leurs veilles; Et tous ceux qu'Apollon voit d'un meilleur regard De leurs doctes travaux lui donnent quelque part. D'ailleurs, si par les biens on prise les personnes, Le théâtre est un fief dont les rentes sont bonnes; Et votre fils rencontre en un métier si doux Plus d'accommodement qu'il n'eût trouvé chez vous. Défaites-vous enfin de cette erreur commune, Et ne vous plaignez plus de sa bonne fortune. Pridamant Je n'ose plus m'en plaindre, et vois trop de combien Le métier qu'il a pris est meilleur que le mien. Il est vrai que d'abord mon âme s'est émue: J'ai cru la comédie au point où je l'ai vue; J'en ignorais l'éclat, l'utilité, l'appas, Et la blâmais ainsi, ne la connaissant pas; Mais, depuis vos discours, mon coeur plein d'allégresse A banni cette erreur avecque sa tristesse. Clindor a trop bien fait. Alcandre N'en croyez que vos yeux. Pridamant Demain, pour ce sujet, j'abandonne ces lieux; Je vole vers Paris. Cependant, grand Alcandre, Quelles grâces ici ne vous dois-je point rendre? Alcandre Servir les gens d'honneur est mon plus grand désir. J'ai pris ma récompense en vous faisant plaisir. Adieu. Je suis content, puisque je vous vois l'être. Pridamant Un si rare bienfait ne se peut reconnaître: Mais, grand mage, du moins croyez qu'à l'avenir Mon âme en gardera l'éternel souvenir.

« Corneille, L’Illusion comique, acte V, scène 5. (…) Alcandre Cessez de vous en plaindre.

A présent le théâtre Est en un point si haut que chacun l'idolâtre; Et ce que votre temps voyait avec mépris Est aujourd'hui l'amour de tous les bons esprits, L'entretien de Paris, le souhait des provinces, Le divertissement le plus doux de nos princes, Les délices du peuple, et le plaisir des grands; Il tient le premier rang parmi leurs passe-temps; Et ceux dont nous voyons la sagesse profonde Par ses illustres soins conserver tout le monde, Trouvent dans les douceurs d'un spectacle si beau De quoi se délasser d'un si pesant fardeau. Même notre grand roi, ce foudre de la guerre Dont le nom se fait craindre aux deux bouts de la terre, Le front ceint de lauriers, daigne bien quelquefois Prêter l'oeil et l'oreille au Théâtre-François: C'est là que le Parnasse étale ses merveilles; Les plus rares esprits lui consacrent leurs veilles; Et tous ceux qu'Apollon voit d'un meilleur regard De leurs doctes travaux lui donnent quelque part. D'ailleurs, si par les biens on prise les personnes, Le théâtre est un fief dont les rentes sont bonnes; Et votre fils rencontre en un métier si doux Plus d'accommodement qu'il n'eût trouvé chez vous. Défaites-vous enfin de cette erreur commune, Et ne vous plaignez plus de sa bonne fortune. Pridamant Je n'ose plus m'en plaindre, et vois trop de combien Le métier qu'il a pris est meilleur que le mien. Il est vrai que d'abord mon âme s'est émue: J'ai cru la comédie au point où je l'ai vue; J'en ignorais l'éclat, l'utilité, l'appas, Et la blâmais ainsi, ne la connaissant pas; Mais, depuis vos discours, mon coeur plein d'allégresse A banni cette erreur avecque sa tristesse. Clindor a trop bien fait. Alcandre N'en croyez que vos yeux. Pridamant Demain, pour ce sujet, j'abandonne ces lieux; Je vole vers Paris.

Cependant, grand Alcandre, Quelles grâces ici ne vous dois-je point rendre? Alcandre Servir les gens d'honneur est mon plus grand désir. J'ai pris ma récompense en vous faisant plaisir. Adieu.

Je suis content, puisque je vous vois l'être.. »

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