Dans le discours qu'il prononça en Suède lors de la remise de son prix Nobel, Albert Camus disait : « L'art n'est pas à mes yeux une réjouissance solitaire. Il est un moyen d'émouvoir le plus grand nombre d'hommes en leur offrant une image prilvilégiée des souffrances et des joies communes. » En l'appliquant au domaine de la littérature, vous direz quelles réflexions vous inspire cette formule, sans omettre de vous appuyer sur des exemples précis et variés.
Extrait du document
Loin de la société humaine, il peut
retrouver par l'imagination les images charmantes du passé, le souvenir des
êtres chers. C'est dans la nature, au rythme de la marche, que le rêveur
solitaire trouve son épanouissement. C'est alors que l'individu a la pleine
jouissance de sa liberté. Chez les Romantiques, ce désir d'indépendance
vis-à-vis des contraintes et des désillusions qu'engendre la vie sociale,
s'affirme avec plus de netteté encore. La solitude est alors le symptôme d'un
refus du monde et bien souvent d'une inadaptation radicale de l'artiste qui
préfère l'évasion au compromis avec une société où il ne trouve pas sa place. On
ne sera dès lors pas surpris de la récurrence, chez les écrivains de la période
romantique, d'épisodes romanesques ou de poèmes qui présentent des êtres fuyant
sur les
routes, au plus profond des forêts comme au sommet des monts, à la recherche de
leur identité ou d'un bonheur lui-même fugitif, Lamartine, Vigny, Musset, Hugo
se sont fait, dans le domaine poétique, les chantres de cette solitude parfois
heureuse, souvent souffrante, de cette conquête de la liberté. On trouvera une
admirable illustration de leur lyrisme dans le poème de Vigny, « la Maison du
berger » {les Destinées), invitation à fuir « un monde fatal, écrasant et glacé
» pour retrouver la pureté et le bonheur dans l'épaisse bruyère des montagnes.
Les sentiments qui s'expriment dans ce poème, les joies et les souffrances de
rêver la femme aimée, ne sont pas des émotions communes mais des émotions
uniques dont le poète souligne la singularité. C'est précisément cet amour qui
lui donne le sentiment de sa propre individualité. L'écriture poétique apparaît
bien dans ce cas une « réjouissance solitaire » qui n'accueille que l'être aimé,
et l'artiste semble ne trouver le chemin de la création que dans ce retrait par
rapport au monde et dans l'approfondissement de ses propres sentiments.
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