Émile Zola, L'Assommoir, chapitre XIII.
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Émile Zola, L'Assommoir, chapitre XIII.
Oh ! elle n'eut pas besoin de demander des nouvelles. Dès le bas de l'escalier, elle entendit la chanson de Coupeau. Juste le même air, juste la même danse. Elle pouvait croire qu'elle venait de descendre à la minute, et qu'elle remontait. Le gardien de la veille, qui portait des pots de tisane dans le corridor, cligna de l'oeil en la rencontrant, pour se montrer aimable.
"Alors, toujours ? dit-elle.
- Oh ! toujours", répondit-il sans s'arrêter. Elle entra, mais elle se tint dans le coin de la porte, parce qu'il y avait du monde avec Coupeau. L'interne blond et rose était debout, ayant cédé sa chaise à un vieux monsieur décoré, chauve et la figure en museau de fouine. C'était bien sûr le médecin en chef, car il avait des regards minces et perçants comme des vrilles. Tous les marchands de mort subite vous ont de ces regards-là.
Gervaise, d'ailleurs, n'était pas venue pour ce monsieur, et elle se haussait derrière son crâne, mangeant Coupeau des yeux. Cet enragé dansait et gueulait plus fort que la veille. Elle avait bien vu, autrefois, à des bals de la mi-carême, des garçons de lavoir solides s'en donner pendant toute une nuit ; mais jamais, au grand jamais, elle ne se serait imaginé qu'un homme pût prendre du plaisir si longtemps ; quand elle disait prendre du plaisir, c'était une façon de parler, car il n'y a pas de plaisir à faire malgré soi des sauts de carpe, comme si on avait avalé une poudrière. Coupeau, trempé de sueur, fumait davantage, voilà tout. Sa bouche semblait plus grande, à force de crier. Oh ! les dames enceintes faisaient bien de rester dehors. Il avait tant marché du matelas à la fenêtre, qu'on voyait son petit chemin à terre ; le paillasson était mangé par ses savates.
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