En janvier 1976, lors de la parution de son roman La Vazlse aux Adieux, l'écrivain tchèque Milan Kundera déclarait: Dans la vie, l'homme est continuellement coupé de son propre passé et de celui de l'humanité. Le roman permet de soigner cette blessure. L'opinion de Kundera sur la fonction de l'oeuvre romanesque rejoint-elle votre expérience de lecteur ?
Extrait du document
«
PLAN ADOPTÉ DANS LE DEVOIR
I.
Le roman permet de retrouver le temps perdu et de redonner à l'homme la conscience d'une unité
L'homme en quête de son passé
À la recherche du temps perdu : roman et autobiographie
À la recherche du temps perdu : roman et histoire
IL L'écriture romanesque et la recomposition du passé
Procédés de composition : linéarité, totalisation, extension
La fiction d'une continuité de la vie
Le passé ressuscité à travers des destins individuels
Contamination du passé et du présent
III.
Le roman : une interrogation sur le temps
De la continuité à la discontinuité
Le temps recherché plus que saisi
L'oubli du passé, le rêve de l'avenir
DEVOIR RÉDIGÉ
Le roman permet d'exprimer les relations complexes entre l'homme et le temps.
Milan Kundera déclarait à ce propos
en janvier 1976, lors de la parution de son roman la Valse aux Adieux : « Dans la vie, l'homme est continuellement
coupé de son propre passé et de celui de l'humanité.
Le roman permet de soigner cette blessure.
» Cette réflexion
est doublement intéressante puisqu'elle articule les deux dimensions de l'existence humaine : la dimension individuelle
et la dimension collective.
Ce que Milan Kundera souligne, c'est non seulement la déchirure, « la blessure » de l'être
à la recherche de son passé mais encore les fractures de l'histoire et l'oubli qui coupent l'homme du passé de
l'humanité.
Le roman serait ainsi le moyen pour l'écrivain et ses lecteurs de combler les vides apparus dans l'histoire
personnelle ou collective.
Il serait comme un fil de vie entre hier et aujourd'hui.
Il est vrai que le roman permet de
retrouver le temps perdu» et de redonner à l'individu la conscience d'une unité.
L'écriture romanesque la rend propre
à cette recomposition du passé mais sa fonction n'est-elle pas aussi d'interroger les différentes régions du temps,
quitte à en manifester l'impossible totalité ?
Les héros de Milan Kundera, dans son roman L'Insoutenable Légèreté de l'Être, vivent leur existence comme une
séparation et un exil.
Aux difficultés de leurs amours s'ajoute l'éloignement de leur pays et la distance spatiale est
doublée d'un écart dans le temps.
Comment en effet relier la vie d'aujourd'hui et celle d'hier?
La coupure entre l'homme et son passé est une angoisse fondamentale dont la littérature s'est fait depuis longtemps
l'écho.
Chaque instant vécu vole à l'individu une période de son existence qu'il ne pourra retrouver que par le
souvenir et qui le rapproche inexorablement de la mort.
Or l'homme a besoin de ces moments anciens qui l'ont peu à
peu constitué comme un être singulier.
Il ne peut se séparer sans souffrir des lieux et des êtres qu'il a aimés.
C'est ce qui conduit le narrateur du récit de Nerval, Sylvie, à rechercher son passé en allant revisiter les lieux de sa
jeunesse.
La nouvelle très autobiographique permet à l'écrivain de recomposer sa vie, de ressusciter les plus beaux
instants de son passé, de remonter à l'enfance elle-même.
L'enfance est précisément un thème majeur du roman autobiographique.
La rejoindre par l'écriture du souvenir
comme s'y emploient Marcel Proust ou Marcel Pagnol permet de revivre l'amour d'une mère, les promenades, les
rencontres, les découvertes qui marquent cette période de la vie.
L'écrivain a ainsi le sentiment de renouer avec ses
origines et la mémoire sélective lui permet de ne garder du passé que les moments les plus intenses et les plus purs.
C'est ainsi que dans Sylvie (Nerval), le souvenir d'un baiser donné au narrateur alors qu'il était enfant par une belle
et noble jeune fille nommée Adrienne occupe un chapitre entier et permet à l'écrivain de se replonger dans
l'atmosphère magique de son passé.
Il échappe ainsi à l'idée de la mort et à la division du temps.
Faire revivre le passé est aussi l'ambition du roman historique mais il s'agit alors du destin commun d'un groupe ou
d'un peuple.
Partant de documents ou de sa propre expérience, le romancier arrache à l'oubli les événements du
passé.
Ceux-ci peuvent appartenir à une période récente et, dans ce cas, l'écrivain offre le miroir de l'histoire
immédiate comme s'il était le « reporter » d'un passé encore brûlant.
C'est le cas de Malraux dans son roman l'Espoir
(1937) qui retrace certains épisodes de la guerre civile espagnole alors que celle-ci dure encore.
Mais le romancier
préfère parfois prendre un peu de recul et éclairer une période plus lointaine.
Les écrivains romantiques se sont ainsi
attachés à faire revivre l'histoire de la Révolution française (V.
Hugo dans Quatre-vingt-treize).
Leur récit ramenait
ainsi en lumière des événements que l'histoire officielle avait parfois gommés et permettait par là de souligner un
moment de fracture qui retentit encore dans le temps présent.
Le roman historique ne se contente pas alors de
raconter et de décrire le passé : il l'interprète, rétablit le lien parfois brisé entre hier et aujourd'hui en montrant les
métamorphoses des sociétés humaines.
C'est ainsi une semaine charnière de la vie d'un homme (le peintre Théodore
Géricault) et d'une nation (la France au moment des Cent-Jours et de la fuite des Bourbons) qu'Aragon a voulu ainsi
retracer dans la Semaine Sainte.
Et s'il choisit cette période passée, c'est qu'elle lui semble éclairer le présent.
Pour l'écrivain et pour le lecteur, le roman s'offre donc comme la recherche d'une difficile unité.
Unité de l'être en
quête de ses origines.
Unité de l'histoire en quête d'un devenir.
L'écriture romanesque peut de cette façon être
conçue comme l'instrument d'une reconstitution de la durée.
La composition du roman permet d'offrir l'image d'une continuité.
Ainsi beaucoup d'écrivains choisissent de suivre un
fil chronologique, une linéarité qui peut donner l'impression d'un temps ininterrompu (par exemple dans la Chartreuse
de Parme de Stendhal).
Et lorsque le récit n'est pas linéaire, il retrouve souvent, par des procédés de retour en
arrière, la totalité d'une vie.
C'est ainsi que dans le roman de Balzac, la Peau de Chagrin, la seconde partie, en
revenant sur l'enfance et la jeunesse du héros, permet d'éclairer les événements de sa vie d'adulte évoqués dans la
première et la troisième partie..
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- En janvier 1976, lors de la parution de son roman, La Valse aux adieux, l'écrivain tchèque Milan Kundera déclarait : « Dans la vie, l'homme est continuellement coupé de son propre passé et de celui de l'humanité. Le roman permet de soigner cette blessure. » L'opinion de Kundera sur la fonction de l'oeuvre romanesque rejoint-elle votre expérience personnelle de lecteur ?
- Dans L'Immortalité (Gallimard, 1990), un personnage de Milan Kundera déclare : La tension dramatique, c'est la véritable malédiction du roman parce qu'elle transforme tout, même les plus belles pages, même les scènes et les observations les plus surprenantes, en une simple étape menant au dénouement final, où se concentre le sens de tout ce qui précède. Dévoré par le feu de sa propre tension, le roman se consume comme une botte de paille. Vous confronterez à cette affirmation votre pro
- Vous avez lu un article de presse dans lequel un écrivain contemporain affirme que le roman moderne n'a plus besoin de personnage héroïque. Vous lui écrivez une lettre dans laquelle vous lui exposez votre conception du roman, en fonction de votre expérience et de vos attentes de lecteur.
- On oppose souvent le roman autobiographique où l'écrivain, se campant lui-même sous les traits d'un de ses héros, fait revivre dans d'autres personnages ses proches et ses familiers et le roman où l'auteur, prenant sa revanche sur la vie, prête à l'un de ses héros des qualités et une forme d'existence dont il n'a pas bénéficié lui-même. Connaissez-vous une oeuvre romanesque où s'associent heureusement ces deux types de roman ?
- l'esprit du roman est l'esprit de complexité. Chaque roman dit au lecteur : Les choses sont plus compliquées que tu ne penses. Milan Kundera, l'Art du roman. En vous fondant sur votre expérience de lecteur de romans et de nouvelles, vous expliquerez en quoi vous rejoignez ce propos de Milan Kundera ?