Gérard de NERVAL (1808-1855) (Recueil : Les chimères) - Artémis
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Commentaire composé du poème « Artémis » de Gérard de Nerval
Introduction :
« Artémis » est un sonnet de Gérard de Nerval extrait des Chimères, recueil de sonnets qui parut en 1853.
Notre sonnet est centré autour du personnage d’Artémis, déesse grecque de la chasse, fille de Zeus et de Léto, et
déesse souvent associée à la lune.
Artémis se présente comme une divinité marginale et ambiguë : elle a sa place dans
les zones où les frontières sont floues, entre monde sauvage te monde civilisé et est une déesse vierge qui s’abstient
de tout commerce sexuel avec des hommes et punit sévèrement ceux qui tentent de la séduire.
Projet de lecture : Montrer que ce poème est fondé sur une série d’ambiguïtés empêchant toute
interprétation univoque.
I)
La figure ambiguë et incertaine d’Artémis
1)
Artémis, entre présence et absence
Artémis donne son titre au poème mais n’est curieusement jamais mentionnée au sein de celui-ci.
Sa présence
n’est évoquée que par la mention de certains indices disséminés dans le poème.
L’association constante de l’amour et
de la mort (« Aimez qui vous aima du berceau dans la bière » ; C’est la mort — ou la morte...
Ô délice ! ô tourment ! »)
renvoie au mythe entourant cette déesse selon lequel elle tuait ses amants.
La présence d’Artémis est aussi figurée
par la référence aux « fantômes blanc » qui fait écho à sa dimension lunaire.
2)
Artémis : symbole du mystère féminin
La référence à Artémis, en titre de poème, se présente comme une clé d’interprétation.
La « reine » qu’est
l’amante est une Artémis, une déesse mystérieuse et ambiguë pour le poète amant.
La femme est à la fois une amante
et une sainte, à la fois humaine et déesse dans ce poème : les deux premiers quatrains évoquent l’amante, la reine de
l’amour, figurée par la « Rose Trémière », symbole de beauté ; les deux tercets présentent la femme comme une sainte
( « Sainte napolitaine…sainte Gudule …La sainte de l’abîme ») dont l’emblème est désormais la « rose au cœur violet »,
le violet étant symbole d’humilité et de générosité.
La femme est à la fois délicieuse et effrayante : les deux quatrains évoquent une « reine » de l’amour, du plaisir mais
constamment liée à la mort : « Ô délice ! ô tourment ! » : le parallélisme de ces deux termes placés en fin de vers
évoque bien cette ambiguïté féminine essentielle entre plaisir et malheur.
Les deux tercets tissent un lien étroit entre
sainteté et enfer : la « sainte napolitaine » ( Sainte Rosalie) a « les mains pleines de feux », le feu évoquant les
enfers.
La référence à sainte Gudule nourrit cette ambiguïté puisque Sainte Gudule a eu affaire au diable qu’elle a
vaincu, et non à Dieu.
Le dernier tercet pousse au paroxysme cette association entre sainteté et enfers en évoquant
la « sainte de l’abîme » .
II)
L’amour et la mort
1)
L’amour par delà la mort
On assiste, dans ce sonnet à un amour qui résiste par delà la mort.
La « Treizième » évoquée au début du poème,
évoque la treizième heure qui est celle de la mort.
Nerval la présente comme « le seul moment possible » pour l’union
des amants.
Le poète, dans le deuxième quatrain propose de mesurer la puissance d’un amour à sa capacité à résister
à la mort : « Aimez qui vous aima du berceau dans la bière », les métonymies « berceau » et « bière » figurant les
moments de la naissance et de la mort.
L’amour semble être plus fort que le trépas :
Celle que j’aimai seul m’aime encor tendrement :
C’est la mort — ou la morte...
Ô délice ! ô tourment !
La rose qu’elle tient, c’est la Rose trémière.
à le parallélisme de construction du premier vers avec la répétition du verbe aimer suggère la répétition dans la mort de
cet amour indéfectible.
La rime « tendrement »/ « tourment » révèle que les tourments de la morts sont vécus sur un
mode doux par l’amant grâce à la force de l’amour.
2)
L’amour de la mort
A mesure de la progression du poème, on observe la transformation de l’amour par delà la mort en véritable
amour de la mort.
Le deuxième quatrain laisse planer l’équivoque sur l’objet d’amour de l’amant : « Celle que j’aimai seul
m’aime encor tendrement:/C’est la mort — ou la morte » : ce n’est don pas l’amante, la femme qu’aime le poète, mais
la mort elle-même représentée par cette femme.
La progression dans l’évocation des différentes roses marque cette
évolution du poète vers un amour de la mort : la première référence à la rose trémière symbolisait encore l’amour de la.
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