HUET, Traité de l'origine des romans, 1670
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HUET, Traité de l'origine des romans, 1670
Autrefois sous le nom de romans on comprenait non seulement ceux qui étaient écrits en prose, mais plus souvent encore ceux qui étaient écrits en vers. Mais aujourd'hui l'usage contraire a prévalu, et ce que l'on appelle proprement romans sont des fictions d'aventures amoureuses, écrites en prose avec art, pour le plaisir et l'instruction des lecteurs. Je dis des fictions, pour les distinguer des histoires véritables. J'ajoute d'aventures amoureuses, parce que l'amour doit être le principal sujet du roman. Il faut qu'elles soient écrites en prose, pour être conformes à l'usage de ce siècle. Il faut qu'elles soient écrites avec art et sous certaines règles ; autrement ce sera un amas confus, sans ordre et sans beauté. La fin principale des romans, ou du moins celle qui le doit être, et que se doivent proposer ceux qui les composent, est l'instruction des lecteurs, à qui il faut toujours faire voir la vertu couronnée et le vice châtié. Mais comme l'esprit de l'homme est naturellement ennemi des enseignements et que son amour-propre le révolte contre les instructions, il le faut tromper par l'appât du plaisir et adoucir la sévérité des préceptes par l'agrément des exemples, et corriger ses défauts en les condamnant dans un autre. Ainsi le divertissement du lecteur, que le romancier habile semble se proposer pour but, n'est qu'une fin subordonnée à la principale, qui est l'instruction de l'esprit, et la correction des moeurs : et les romans sont plus ou moins réguliers selon qu'ils s'éloignent plus ou moins de cette définition et de cette fin.
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