Jean de SPONDE (1557-1595) - Sur sa fièvre
Extrait du document
Jean de SPONDE (1557-1595) - Sur sa fièvre Que faites-vous dedans mes os, Petites vapeurs enflammées, Dont les pétillantes fumées M'étouffent sans fin le repos ? Vous me portez de veine en veine Les cuisants tisons de vos feux, Et parmi vos détours confus Je perds le cours de mon haleine. Mes yeux, crevés de vos ennuis, Sont bandés de tant de nuages Qu'en ne voyant que des ombrages Ils voyent des profondes nuits. Mon cerveau, siège de mon âme, Heureux pourpris de ma raison, N'est plus que l'horrible prison De votre plus horrible flamme. J'ai cent peintres dans ce cerveau, Tous songes de vos frénaisies, Qui grotesquent mes fantaisies De feu, de terre, d'air et d'eau. C'est un chaos que ma pensée Qui m'élance ore sur les monts, Ore m'abîme dans un fond, Me poussant comme elle est poussée. Ma voix qui n'a plus qu'un filet A peine, à peine encore tire Quelque soupir qu'elle soupire De l'enfer des maux où elle est. Las ! mon angoisse est bien extrême, Je trouve tout à dire en moi, Je suis bien souvent en émoi, Si c'est moi-même que moi-même. A ce mal dont je suis frappé Je comparais jadis ces rages Dont Amour frappe nos courages, Mais, Amour, je suis bien trompé, Il faut librement que je die : Au prix d'un mal si furieux, J'aimerais cent mille fois mieux Faire l'amour toute ma vie.
Liens utiles
- Jean de SPONDE (1557-1595) - Les vents grondaient en l'air, les plus sombres nuages
- Jean de SPONDE (1557-1595) - Tout le monde se plaint de la cruelle envie
- Jean de SPONDE (1557-1595) - Quand le vaillant Hector, le grand rempart de Troie
- Jean de SPONDE (1557-1595) - Mortels, qui des mortels avez pris vostre vie
- Jean de SPONDE (1557-1595) - Stances