Lamartine- Odes politiques
Extrait du document
«
On distinguera :
I.
— LA PART DE POÉSIE :
Il faut avouer que le lyrisme, au sens habituel du mot, est absent : aucun sentiment tendre.
Seule l'éloquence, et une
éloquence épique, en tient lieu.
Du reste il s'agit d'une ode et d'une ode impersonnelle.
Ce qui donne le change c'est le ton
enflammé (le "moi" de Lamartine est donc présent) et l'emploi du vers.
II.
— LA PART D'ÉLOQUENCE :
A.
— Lamartine soutient une thèse dont il tire deux conséquences :
a)
—
—
—
—
fins
La thèse :
il y a un progrès : immortel flambeau;
qui peut connaître des montées et des descentes (vers 18);
qui a pu avoir dans le passé des aspects hideux ou risibles, voire démentiels;
mais qui n'en réalise pas moins les desseins de Dieu.
En gros, c'est la reprise de la thèse de Bossuet, historien, pour des
que celui-ci aurait réprouvées.
b)
Première conséquence : la thèse contenue dans le vers 1 : le changement est la loi du monde aussi bien dans le
domaine religieux (amulette des prêtres), politique (sceptres, glaives, faisceaux), militaire (haches, houlettes, armure) que
vestimentaire (robes, toges, etc.).
c)
Deuxième conséquence : sous ces changements, quelque chose ne change pas : leur direction lointaine, car il s'agit de
réaliser — sur terre — le royaume de Dieu (4e strophe).
B.
— Cette thèse, Lamartine la lance comme une vraie objurgation à ses adversaires politiques : aux réactionnaires,
aux conservateur aux traditionalistes.
Relever :
a)
un certain mouvement oratoire : Marchez !...
Et vous vous demandez...
Sous le vôtre, ô chrétiens.
Bref il s'adresse à des
contradicteurs imaginaires;
b)
l'inspiration épique qui, avec ses agrandissements, ses comparaisons amplifiantes est l'inspiration auxiliaire naturelle de
l'éloquence;
c)
la structure et le mouvement même de la strophe qui finit chaque fois sur un vers plus court, prolongeant le précédent
force la pensée comme à se prolonger elle-même et invite à une sorte d'élan.
C.
— Enfin habileté à présenter la thèse :
a) Elle est présentée en deux temps :
•
Le fait du changement continuel des institutions que ses adversaires sont bien obligés de constater avec lui;
•
puis la révélation que ce changement s'accomplit selon leurs propres convictions chrétiennes.
Il les met donc en
contradiction avec eux-mêmes.
b)
Pour ne pas trop les vexer, il admet ce qui a pu les induire en erreur : l'aspect souvent hideux ou risible ou irrationnel de
cette évolution, dans le passé.
Il songe naturellement à leur faire admettre que notre révolution de 89 se place précisément
dans cet axe.
c)
Poésie n'est pas didactisme : un mot concret suffit à Lamartine pour évoquer toute une civilisation, tout un genre de
gouvernement.
Montrez-le.
III — LE LAMARTINE EN SITUATION QUI S'EXPRIME :
a)
Ce texte nous découvre un Lamartine bien différent du poète des Méditations, du
chantre d'Elvire.
Lui-même en a été conscient en soulignant cette évolution dans l'Epître à
Félix Guillemardet.
C'est un Lamartine plus volontiers épique que lyrique.
b)
De plus ce texte est le reflet de ses préoccupations politiques au lendemain de 1830,
et, chez lui, les positions politiques ont rejoint les positions religieuses.
c)
D'une façon plus générale, se rappeler qu'à partir de la Révolution, la pensée s'est
scindée en deux courants devant l'événement :
•
d'un côté, les contre-révolutionnaires (en général sur le plan religieux les
catholiques orthodoxes et sur le plan politique les partisans de la monarchie), où se
recrutent les adversaires de Lamartine;
•
d'un autre côté, les différentes doctrines socialistes et aussi les libéraux qui veulent
réaliser, plus ou moins pleinement, les idéaux de la Révolution.
Parmi eux figurent des
catholiques de gauche comme Dargaud et Lamennais, qui influenceront particulièrement
Lamartine.
Cette tendance vise à réconcilier l'Eglise et la Révolution.
d) Enfin nous avons là un Lamartine assez réaliste, qui ne se fait pas trop d'illusions sur
l'histoire (vers 18) et sur la politique (vers 16).
Siégerait-il tellement au "plafond" comme il
l'a prétendu ?.
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