L'intérêt d'une autobiographie n'est pas tant dans les événements qu'elle raconte que dans le témoignage qu'elle apporte sur le travail de la mémoire et les mécanismes du souvenir.
Extrait du document
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La thèse énoncée par le sujet qui nous occupe aujourd'hui est pour le moins claire : elle affirme l'existence d'une
différence intrinsèque entre les événements racontes par l'autobiographe et le travail de mémoire de ce dernier,
attribuant plus d'intérêt au second qu'aux premiers.
En effet, nous pouvons adhérer à cette thèse dans un premier
temps, semble-t-il, dans la mesure ou les événements racontes par l'autobiographe peuvent toujours nous
apparaitre suspects : qui sait ou commence et ou finit la vérité, ou l'auteur est coupable de complaisance a l'égard
de lui-même et se montre opportunément oublieux.
En revanche, le mécanisme mémoriel lui ne laisse pas d'être
objectif et de nous intéresser au premier chef, dans la mesure où il nous dit quelque chose de la mémoire humaine,
c'est-à-dire de la notre.
Nous dirons donc qu'il semble que le mécanisme du souvenir, la manière dont un individu se
rapporte rétrospectivement a sa propre expérience, est bel et bien plus importante que le contenu de son récit.
Cependant, en affirmant une telle thèse, ne sommes nous pas en train de scinder deux dimensions indissociables en
vérité d'un texte littéraire, à savoir la forme et le fond, le mécanisme et la signification ? De plus, n'affirmons-nous
pas quelque chose qui va a l'encontre du bon sens et de l'expérience : l'internet que nous prenons aux productions
de l'art en général ne tient-il pas pour une grande part au contenu de ce qui est raconte, a l'histoire, aux
événements, aux motifs, au moins autant qu'a la manière de présenter et d'agencer ces motifs ?
Nous nous demanderons donc, en définitive, s'il n'y a pas lieu de réunir la forme et le motif, les événements et le
mécanisme mémoriel, de manière a rendre raison de l'intérêt que nous trouvons a l'autobiographie.
Ce dernier
viendrait alors de la fictionnalisation profonde et implicite des événements bel et bien vécus par l'individu, de sorte
que nous pouvons parler de l'autobiographie comme de l'un des cas particuliers du roman.
I.
Le principal intérêt de l'autobiographie : la mise en évidence du fonctionnement de la
mémoire
a.
L'autobiographie met en évidence les défaillances de la mémoire humaine
Nous commencerons par adhérer à la thèse exprimée par le sujet qui nous occupe aujourd'hui.
En effet, il semble
bien que le principal intérêt de l'autobiographie réside moins dans le contenu du récit, dans les événements narres
par l'autobiographe, que dans la dénudation, la mise en évidence du fonctionnement de la mémoire.
En effet, non
seulement le contenu d'une autobiographie est toujours soumis au doute (l'auteur n'inventerait-il pas des
événements qu'il n'a pas vécu ? ne se flatterait-il pas lui-même au moyen de l'écrit ?) mais ce contenu ne concerne
qu'une seule personne : l'autobiographe lui-même.
En revanche, le fonctionnement de la mémoire est un fait
objectif, qui concerne tous les individus.
L'une des principales caractéristiques de ce fonctionnement est la
défaillance : Rousseau insiste sur le fait que sa mémoire lui joue des tours, et qu'il lui a fallu réinventer, parfois, les
événements dont il n'était pas certain de se souvenir parfaitement…
b.
L'autobiographie met en évidence le fonctionnement sélectif de la mémoire
Par ailleurs, nous pouvons dire que l'intérêt d'une autobiographie réside également dans le fait qu'elle met en
évidence une autre caractéristique du fonctionnement de la mémoire : son caractère sélectif.
En effet, si nous nous
referons aux Mémoires de Casanova nous pouvons constater que son auteur a tendance à ne se rappeler que des
événements positifs de son existence.
Dans la mesure où l'écriture de ce texte répond d'abord a son intention de
revivre par le biais de l'écriture les événements heureux de sa vie, nous pouvons constater qu'il n'a tendance à
raconter que les moments positifs de son existence : ceux ou il disposait de beaucoup d'argent, ceux ou il était aime
et amoureux… L'intérêt d'une autobiographie est donc, définitivement, de dévoiler, dénuder, le fonctionnement
singulier de la mémoire, et tout particulierement la propension de cette dernière à retenir principalement les
évènements qui flattent l'individu ou dont le souvenir lui est agréable…
II.
Scinder le mécanisme de la mémoire de son contenu : une mauvaise compréhension de la
Littérature en général et du genre autobiographique en particulier ?
a.
Propédeutique aux études littéraires : ne pas scinder la forme du fond, la signification du mécanisme littéraire
Cependant, nous pouvons émettre une critique d'importance a l'égard de ce que nous venons d'affirmer : il se peut
que la thèse que nous venons de soutenir soit caractéristique d'une mauvaise compréhension du phénomène.
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