L'oeuvre littéraire de Sartre

Avant même de devenir un écrivain « engagé », Sartre a considéré la littérature, non comme une fin, mais comme un moyen d'exposer sa pensée. Ses romans, ses pièces de théâtre, ses essais impliquent toujours une thèse, transfigurée par l'art. LE ROMANCIER. Dès La Nausée, l'analyse philosophique, quoique très poussée, échappe à l'aridité grâce à la vigueur de la langue, au foisonnement des notations concrètes, à l'intérêt des épisodes, à la diversité des tons : la description du dimanche à Bouville, le récit de la visite du musée, l'histoire de « l'autodidacte » sont d'une verve entraînante et d'une ironie corrosive, qui contrastent avec la tension pathétique des pages où le héros évoque ses crises et son mal. Les nouvelles du Mur atteignent souvent à une grande intensité et la dernière est un chef-d'oeuvre de force satirique. La réussite est moindre dans Les Chemins de la liberté, où l'écrivain semble parfois à la recherche d'une technique comme son personnage à celle d'une conduite : dans le second volume, Le Sursis, il déconcerte le lecteur en changeant de scène sans transition au cours d'un même paragraphe ou d'une même phrase.