Mémoires de Saint-Simon
Extrait du document
«
SAINT-SIMON (1675-1755)
Bien que l'oeuvre de Saint-Simon ait été écrite en plein XVIII.
siècle, la tradition rattache avec juste
raison cet écrivain à l'époque sur laquelle il a porté son témoignage et qui est celle du classicisme
finissant.
Fils d'un vieux gentilhomme vaniteux, mais fidèle, que la faveur de Louis XIII avait fait duc et pair, LOUIS
DE ROUVROY, DUC DE SAINT-SIMON, était malingre et petit.
Malgré cette double disgrâce, il voulut
s'imposer.
Il y apporta beaucoup d'énergie et quelque agressivité.
Il fut d'abord soldat.
Mais déçu de ne
pas dépasser le grade de maître de camp, il quitta l'armée et vint à la cour (1702).
Son mauvais
caractère et sa prétention lui attirèrent beaucoup d'ennemis.
Il n'avait pas la sympathie du roi.
Il fit partie
du groupe d'ambitieux qui s'agitaient autour du jeune duc de Bourgogne, rêvant d'une rénovation de la
monarchie.
Sous la Régence, il entreprit de conseiller Philippe d'Orléans, avec lequel il était lié par une amitié de jeunesse.
Ne se
jugeant pas suffisamment écouté, il refusa d'être garde des Sceaux et gouverneur du jeune roi.
Il accepta
cependant une ambassade en Espagne.
Après la mort du Régent (1723), il se retira de la cour.
La fin de sa vie fut
triste, car il perdit à peu d'années d'intervalle sa femme qu'il aimait tendrement et ses deux fils.
Il vécut assez pour
voir paraître les premiers volumes de l'Encyclopédie.
Les Mémoires.
Dès 1694, Saint-Simon avait commencé de noter ses impressions au jour le jour.
En 1729, ayant eu
connaissance du journal manuscrit de Dangeau (aide de camp de Louis XIV), il entreprit d'en rectifier les erreurs.
C'est en 1739 seulement qu'il eut l'idée de mettre en forme les notes qu'il avait accumulées.
Il consacra douze ans à
ce travail.
Les manuscrits de Saint-Simon (173 cahiers) furent mis sous séquestre par Choiseul.
Par là s'explique leur
publication tardive : 1829-1830.
L'ouvrage porte sur les années 1691 à 1723.
Saint-Simon ne se borne pas à relater des faits dont il a été le témoin.
Il prétend faire une histoire aussi complète que possible de la cour de France à la fin du règne de Louis XIV et sous
la Régence.
• LEUR VALEUR HISTORIQUE
L'oeuvre est d'une richesse d'information incomparable et les faits qu'elle relate sont en général exacts.
Mais l'auteur
manque de largeur de vues.
Il prend au sérieux des faits aussi insignifiants que les querelles de préséance.
Il donne
aux grands événements des explications mesquines.
Il est animé d'une haine méprisante contre le régime sous lequel
il s'est senti opprimé, contre le souverain, son entourage « de roture et de vile bourgeoisie », et celle qu'il appelle «
la Scarron ».
Il ne faudrait d'ailleurs pas le croire malveillant par principe.
Il sait, à l'occasion, se montrer généreux
dans l'éloge.
> LEUR VALEUR ARTISTIQUE
Aussi bien les portraits individuels (Fénelon, la duchesse de Bourgogne), que les scènes historiques (la mort du
grand dauphin), prennent sous la plume de
Saint-Simon un relief saisissant.
Derrière les apparences, il excelle à découvrir les sentiments inavoués, les drames
cachés.
Pour mieux faire voir, il exagère les traits jusqu'à la caricature.
Son style est plein d'archaïsmes, de néologismes, de termes vulgaires, de métaphores étranges et puissantes, de
phrases enchevêtrées : style d'un grand seigneur indifférent aux règles du bon usage; style admirable de richesse et
de vie.
Cet écrivain tumultueux, comparable par son talent au cardinal de Retz, a produit l'une des oeuvres les plus
originales de la prose française..
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