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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) - Effet de nuit

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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) - Effet de nuit La nuit. La pluie. Un ciel blafard que déchiquette De flèches et de tours à jour la silhouette D'une ville gothique éteinte au lointain gris. La plaine. Un gibet plein de pendus rabougris Secoués par le bec avide des corneilles Et dansant dans l'air noir des gigues nonpareilles, Tandis, que leurs pieds sont la pâture des loups. Quelques buissons d'épine épars, et quelques houx Dressant l'horreur de leur feuillage à droite, à gauche, Sur le fuligineux fouillis d'un fond d'ébauche. Et puis, autour de trois livides prisonniers Qui vont pieds nus, un gros de hauts pertuisaniers En marche, et leurs fers droits, comme des fers de herse, Luisent à contresens des lances de l'averse.

« Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) – « Effet de nuit » Introduction : Le poème « Effet de nuit » se trouve dans la section « Eaux Fortes » du recueil de Verlaine, Poèmes saturniens, publié en 1866.

Dans ce recueil, Verlaine se pace sous le signe de Saturne, planète de la mélancolie.

Les Saturniens figurent une sorte de communauté imaginaire à laquelle se trouvent associés tous ceux qui subissent l'influence de la « fauve planète.

» La section « Eaux Fortes » au sein de laquelle prend place « Effet de nuit » est dédiée au poète parnassien François Coppée.

L’eau forte est un type de gravure, le plus apte, selon Baudelaire à exprimer la personnalité et l’individualité de l’artiste. Projet de lecture : En quoi ce poème est-il « saturnien » ? I) Un spectacle morbide 1) Une vision personnelle Verlaine propose une description très visuelle et très personnelle dans ce poème.

Il se fait un point de vue offrant la description d’un paysage nocturne à étudier la composition du poème : le point de vue est celui du poète qui regarde un paysage de haut en bas ( le « ciel » d’abord, puis la « ville » dans son ensemble, puis, le « gibet », jusqu’aux hommes marchant sur le sol) et qui nous propose une vision allant du général au particulier. à l’attention du regard se porte sur les éléments verticaux qui viennent rompre l’harmonie du ciel ou de la plaine : cf.

les éléments évoquant une verticalité qui marque une rupture et attire l’œil du poète observateur : « flèches… tours… gibet…buissons d’épine…hauts pertuisaniers…fers droits ».

Le verbe « déchiquette » montre, dès le premier vers, que ce sont les éléments dissonants, marquant une rupture sur l’étendue du ciel ou de la plaine, qui vont attirer l’attention du poète. 2) Une description picturale Ce poème se présente comme un véritable tableau comme son titre même l’indique à travers le terme d’ « effet ».

Verlaine y met en œuvre lexicalement certaines techniques picturales.

Il rivalise ici avec les aqua-fortistes en proposant un poème composé de traits fins et prolongés, de mots juxtaposés ( « La nuit.

La pluie.

Un ciel blafard… » ; « La plaine.

Un gibet plein de pendus rabougris » ; « Quelques buissons d’épine épars et quelques houx »). Cette technique de juxtaposition de mots comme autant de touches de peinture rapproche Verlaine des impressionnistes. à étudier aussi, pour montrer l’aspect pictural du poème, sa construction sur un camaïeu de gris et noir ( « nuit…éteinte…gris…air noir…fuligineux ») + le goût de Verlaine pour la nuance ( qu’il préfère à la couleur franche) cf. des termes comme « blafard » et « livides » 3) La peinture d’une atmosphère morbide On assiste finalement, dans ce poème, à un véritable spectacle morbide.

La présence de la mort transparaît dans tous les éléments décrits. à étudier ici le champ lexical de la violence : « déchiquette…flèches…tours…gibet…pendus…fers…lances » à étudier l’aspect fantomatique des personnages évoqués : cf.

les pendus « dansant dans l’air noir », tels des fantômes.

Cf.

évocation des « livides prisonniers », l’adjectif « livide » les présentant comme des morts-vivants.

Ce paysage fantomatique exprime l’ « horreur » : l’ « effet de nuit » est donc un effet terrifiant. à étudier la présence du registre pathétique à travers les détails morbides précisés par le poète : « pendus rabougris/ Secoués par le bec avide des corneilles » ( description facilement visualisable par le lecteur et qui provoque un profond dégoût mêlé de terreur).

On peut ici évoquer la référence, dans ce poème, au pathétique de la Ballade des pendus de François Villon : La pluie nous a lessivés et lavés Et le soleil nous a séchés et noircis; Pies, corbeaux nous ont creusé les yeux, Et arraché la barbe et les sourcils. II) Un poème mélancolique Ce poème profondément pictural est paradoxalement très marqué par la subjectivité du poète et reflète la mélancolie de son âme. 1) Le paysage est un miroir de l’âme Le paysage nocturne décrit par Verlaine se présente comme un miroir de son âme.

Loin de s’adonner à une. »

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