Proust, la littérature est une vie enfin éclairée et éclaircie
Publié le 02/04/2024
Extrait du document
«
"La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue,
c'est la littérature" Temps retrouvé, M.Proust
La vie est vécue partiellement sans la littérature.
Dès lors que nous lisons, nous ouvrons les
portes de mondes jusqu’à présent inconnus qui en disent long sur nous et sur la vérité.
Le lecteur
s’affranchit de ce qu’il est grâce à la fiction et, par conséquent, cette expérience lui permet de saisir
la vérité.
La littérature, par sa puissance fictionnelle, joue un rôle important dans l’élargissement des
horizons intellectuels et émotionnels.
Une lecture réussie suppose que l’auteur parvienne à “faire
croire” en créant un récit vraisemblable et cohérent.
Lorsque l’on croit en une fiction, on accepte
l’illusion d’une réalité, on se prend pour ce qu’on n’est pas et on adopte le point de vue d’un
personnage (ou de plusieurs) : on s’affranchit du réel.
Ainsi certains écrivains ont utilisé la littérature
et sa capacité à “faire croire” en vue de déconstruire une idéologie qui, à l’époque mais parfois
encore aujourd’hui, allait à l’encontre des droits fondamentaux.
D’une part, la littérature, en tant
qu'exploration de l'altérité et de l'individualité singulière, contribue à combattre les préjugés racistes.
Martha Nussbaum, dans L’art d’être juste, appelle cela “l’attitude littéraire d’imagination
sympathique” : à partir du moment où le lecteur pâtit avec (sens étymologique de “sympathique”)
un personnage, les présupposés cèdent.
Cette thèse est illustrée en 1962 par Harper Lee dans To Kill
the mockingbird : y est relaté, à travers le regard de Scout Finch, une petite fille blanche de
l’Alabama, le procès injuste de Tom Robinson, un homme noir accusé à tort par une femme blanche.
Ce livre, publié 7 ans après l’arrestation de Rosa Parks, s’inscrit dans une volonté de sortir la société
américaine de l’idéologie raciste et de lutter pour que les Afro-américains acquièrent les droits
fondamentaux.
Les mots, en produisant une fiction vraisemblable, transforment le réel.
La littérature
admet donc une puissance de transformation du réel qui lui confère des responsabilités.
En quoi le
rôle de l’écrivain est-il de révéler ce qu’est la “vraie vie” ?
Le rôle de l'écrivain est de révéler des mondes particuliers en partageant différentes
perspectives de la réalité.
Être lecteur, c’est d’abord vivre une nouvelle vie.
Lorsque l’on est lecteur,
on joue le jeu d’incorporer le corps et l’esprit d’un autre, pensés par l’auteur.
Non seulement le “je”
lit une histoire mais il la vit par l’imagination.
Les contemporains et les contemporaines de Flaubert
comprennent, en lisant Mme de Bovary, la tragédie des mariages arrangés et les inégalités
hommes-femmes liées à la domination qu'exercent les hommes, particulièrement, à cette époque-là.
Dans le cinquième tome de la Recherche, “La Prisonnière”, Proust montre que l’artiste “voit enfin” : il
parvient, grâce à un travail acharné, à mettre en relief les mouvements subtils de sa vie intérieure.
Puisqu'il produit une œuvre et que cette œuvre est diffusée, il livre ainsi à d'autres son monde
particulier, unique, qui sans cela, “resterait le secret éternel de chacun“.
L’ouvrage littéraire convie
son lecteur à explorer le spécifique à travers un mécanisme de découverte qui participe à une vie
pleine.
La multitude de vies vécues par la fiction enrichit notre existence et la rend “pleine”.
La
révélation d’un monde particulier se réalise ici à travers la lecture.
Pourtant l’écriture est aussi un
moyen de vivre pleinement car elle permet de se découvrir ou de se retrouver.
En 1910, Colette Willy
écrit La Vagabonde, un roman qui relate la vie d’une jeune artiste, Renée Nérée, à travers ses
expériences, ses rencontres amoureuses et son désir d’indépendance.
Alors que Renée est
profondément déchirée par ses expériences passées de l'amour, Maxime, un artiste-peintre, la
courtise.
La relation amoureuse devient de plus en plus intense bien que Renée demeure
traumatisée par son expérience....
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