René-François SULLY PRUDHOMME (1839-1907) (Recueil : Les vaines tendresses) - Pèlerinages
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René-François SULLY PRUDHOMME (1839-1907) (Recueil : Les vaines tendresses) - Pèlerinages En souvenir je m'aventure Vers les jours passés où j'aimais, Pour visiter la sépulture Des rêves que mon coeur a faits. Cependant qu'on vieillit sans cesse, Les amours ont toujours vingt ans, Jeunes de la fixe jeunesse Des enfants qu'on pleure longtemps. Je soulève un peu les paupières De ces chers et douloureux morts ; Leurs yeux sont froids comme des pierres Avec des regards toujours forts. Leur grâce m'attire et m'oppresse ; En dépit des ans révolus Je leur ai gardé ma tendresse ; Ils ne me reconnaîtraient plus : J'ai changé d'âme et de visage ; Ils redoutent l'adieu moqueur Que font les hommes de mon âge Aux premiers rêves de leur coeur, Et moi, plein de pitié, j'hésite, J'ai peur qu'en se posant sur eux Mon baiser ne les ressuscite : Ils ont été trop malheureux.
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