Résumé: Les Liaisons dangereuses de CHODERLOS DE LACLOS

« Les Liaisons dangereuses de CHODERLOS DE LACLOS Pierre Choderlos de Laclos (1741-1803) ne se distingue dans sa vie et dans ses ouvrages que par la production d'un seul chefd'oeuvre.

Sa carrière militaire, le double jeu auquel il se livre entre sa fidélité au duc d'Orléans, futur Philippe Égalité, et son jacobinisme', ses exils, ses incarcérations, expliquent-ils les Liaisons dangereuses, rouages diaboliques assemblés dans le calme de l'île d'Aix par un moraliste qui dénonce les vices en les peignant? 1782, Lettres recueillies dans une société et publiées pour l'instruction de quelques autres. On suit au cours de ces 175 lettres le cours de trois histoires étroitement imbriquées l'une dans l'autre : la vengeance de Ivre de Merteuil sur Gercourt, son ancien amant qui l'a abandonnée dans l'intention d'épouser Cécile Volanges, innocente victime de la machination ; les manoeuvres du vicomte de Valmont pour séduire l'austère et prude présidente de Tourvel ; l'amour qui naît entre Cécile Volanges et le chevalier Danceny.

Deux âmes damnées, Mme de Merteuil et le vicomte de Valmont, qui alimentent leur complicité des reliefs d'une liaison ancienne, règnent sur un réseau d'intrigues que les lettres propagent, et d'équivoques que crée ce moyen de communication entre les personnages. « Il m'est venu une excellente idée, et je veux bien vous en confier l'exécution », écrit Mme de Merteuil à Valmont.

Il s'agit de perdre Cécile Volanges.

Valmont, occupé par la conquête de Mme de Tourvel, décline « cette mission d'amour » : en outre, la proie lui paraît trop facile.

C'est alors que Mme de Merteuil songe à son nouvel amant, le chevalier Danceny, et favorise le penchant qu'il éprouve pour Cécile.

Les deux jeunes gens s'avouent leur amour au moment même où Mme de Tourvel, sur les conseils de Mme de Volanges, éloigne Valmont, dont elle ne fait qu'exciter le désir : « Ah ! qu'elle se rende, mais qu'elle combatte » (Lettre 23).

A peine Cécile commence-t-elle à s'alarmer du retour du comte de Gercourt, qui est en Corse, et de son mariage qu'elle refuse, que sa mère découvre les lettres de Danceny.

A qui les amoureux vont-ils désormais confier leurs messages clandestins ? A Valmont ! Celui-ci fait croire à Cécile que Danceny ne l'aime plus.

Mais rencontrant Danceny chez Mme de Merteuil, il en éprouve de la jalousie et blesse l'amour-propre de son ancienne maîtresse.

Pour se venger, Mme de Merteuil instruit Danceny de la duplicité de Valmont.

Danceny provoque Valmont en duel et le tue.

M' de Tourvel ne survit pas à ses remords.

Cécile entre au couvent.

Danceny divulgue les lettres de Mme de Merteuil que Valmont lui avait remises, et s'engage dans l'ordre de Malte.

Mme de Merteuil s'exile, atteinte de la petite vérole : « En vérité, ce serait, je crois, un bonheur pour elle d'en mourir », conclut Mme de Volanges (Lettre 173).

Le vice est châtié. • Le mal pour le mal : se venger de Gercourt n'est qu'un prétexte.

Mme de Merteuil veut pervertir Cécile.

Elle s'explique sur elle-même dans la lettre 81.

Une marquise, un vicomte, un comte, une présidente, un chevalier : condamnation d'une classe, l'aristocratie, marquée au coin de la débauche et que la Révolution allait dénoncer ? • La psychologie : elle est d'une grande richesse et s'étend jusqu'aux personnages secondaires.

Il faudrait analyser l'âme de chacun. Pris dans les filets de Mme de Merteuil, aucun n'est libre.

La nostalgie de la Nouvelle Héloïse plane sur « cette pourriture sentimentale » où l'amour s'ensevelit. • La composition : la maîtrise et l'alternance des lettres y sont aussi machiavéliques que l'action : autant de versions des mêmes faits (Lettres 6, 9 et 11) ; la révélation d'un stratagème en suit souvent les effets (Lettre 63). • L'originalité : l'exploration du Mal, la volonté de détruire les âmes, apparaissent comme un moteur romanesque puissant.

Le roman n'idéalise plus, il transcende la corruption. Les Liaisons dangereuses (1782) sont un roman présenté sous forme épistolaire (il est entièrement composé de cent soixante-quinze lettres).

Il partage cette particularité avec La Nouvelle Héloïse (1761) de Jean-Jacques Rousseau, autre chef-d'œuvre du roman français au XVIIIe siècle. Poussé par la funeste marquise de Merteuil, son ancienne maîtresse, le vicomte de Valmont, libertin notoire, se livre à de machiavéliques intrigues amoureuses. Pierre-Ambroise-François Choderlos de Laclos (1741-1803) n'était pas un homme de lettres, mais un soldat qui servait dans l'artillerie, il fut même l'inventeur du boulet creux, ou obus.

Homme de guerre, rompu dans l'art de Vauban, il semble avoir transmis son sens de la stratégie à ses héros, qui mènent leurs intrigues amoureuses comme un jeu d'échecs.

Derrière le romancier perce le mathématicien. Le libertinage du vicomte de Valmont Libertin, expert en séduction, le vicomte de Valmont tente de vaincre la résistance amoureuse de la présidente de Tourvel, dont il se sent amoureux.

Seule la conquête peut le guérir d'un sentiment aussi humiliant.

Mais la marquise de Merteuil, sa complice dont il fut autrefois l'amant, lui demande d'accomplir pour elle une vengeance.

Opération facile puisqu'il s'agit, pour la venger d'un de ses amants, de corrompre la jeune fiancée de celui-ci, tout juste sortie du couvent.

L'affaire est rendue plus aisée encore par le fait que Danceny, le confident de Valmont, est l'objet de l'amour de la jeune fille, Cécile de Volanges.

Grâce aux manœuvres de la marquise de Merteuil, Valmont se retrouve dans le château de sa tante avec la présidente et la jeune Volanges.

Valmont a tôt fait de rendre celle-ci libertine à son insu, sans toutefois la détourner de Danceny.

Bientôt elle doit avorter.

Elle se réfugie alors dans un couvent et prend le voile. Un ouvrage corrosif Il s'agit alors pour Valmont de mener à bien la conquête de la présidente qu'il aime.

Affaire délicate dans laquelle le vicomte doit jouer avec doigté ; il doit retourner la vertu de la présidente contre elle-même : pour le sauver elle doit céder.

Ce qu'elle finit par faire.

Mais la marquise de Merteuil, piquée dans son orgueil par les sentiments que la présidente éveille chez Valmont, lui demande de rompre, s'il veut bénéficier à nouveau de ses faveurs.

La présidente ne survivra pas à cette rupture.

Déçu dans son attente, Valmont rompt avec la marquise.

Le sort change alors de camp : la marquise dévoile le stratagème à Danceny, qui tue Valmont en duel ; quant à la marquise de Merteuil, ruinée, défigurée par la vérole, elle doit quitter le pays.

Roman corrosif qui n'a rien perdu de sa force, Les Liaisons dangereuses sont un ouvrage remarquable qui reflète l'esprit du XVIIIe siècle (de Sade plutôt que celui de Rousseau).

La fin, cependant, apparaît négligée, et son moralisme semble concédé par l'auteur à la société bien-pensante de l'époque.

Un livre efficace, mais qui doit être lu avec précaution.. »