Rousseau écrit: La tragédie est si loin de nous, elle nous présente des êtres si gigantesques, si boursouflés, si chimériques que l'exemple de leurs vices n'est guère plus contagieux que celui de leurs vertus n'est utile. Partagez-vous cette condamnation de la tragédie par Rousseau ? Vous appuierez votre argumentation sur des exemples précis tirés des tragédies de RACINE que vous connaissez ?
Extrait du document
«
Sujet : Rousseau écrit: La tragédie est si loin de nous, elle nous présente des êtres si gigantesques, si
boursouflés, si chimériques que l'exemple de leurs vices n'est guère plus contagieux que celui de leurs
vertus n'est utile.
Partagez-vous cette condamnation de la tragédie par Rousseau ? Vous appuierez votre
argumentation sur des exemples précis tirés des tragédies de RACINE que vous connaissez ?
On connaît la thèse de la Lettre à d'Alembert : le théâtre est pernicieux.
La tragédie est funeste, parce qu'elle
excite les passions, rend les criminels sympathiques, nous attendrit sur des infortunes feintes.
Mais elle est moins
mauvaise que la comédie...
(Cf.
Fénelon se félicitant des imperfections des spectacles, parce que « la faiblesse du
poison diminue le mal.
»)
I.
La tragédie est-elle si loin de nous ?
Oui, semble-t-il.
Les sujets sont tirés de l'histoire ancienne ou de la fable : Phèdre, Iphigénie, Horace (cf.
Beaumarchais), les personnages sont des princes ou des rois...
Mais les aventures sont souvent communes, les «
grands intérêts d'État » nous sont présentés sous un jour qui nous les rend accessibles (Horace); les passions sont
les mêmes que maintenant.
Les rois sont des hommes comme nous.
II.
Les personnages sont-ils « gigantesques, boursouflés, chimériques ? »
1.
Gela n'est évidemment pas vrai de Racine.
Il peint les hommes tels qu'ils sont...
Toujours vrais, humains, près de nous, et non seulement ceux qui sont faibles,
mais même les vrais héros; non seulement Pyrrhus, mais Joad, Hermione, mais Andromaque.
Analyses.
2.
Et pas davantage de Corneille.
Il suffit de nommer les chefs-d'oeuvre...
Il ne faut pas laisser dire que cela n'est ni
vrai, ni humain, ni vivant.
Les héros de Corneille sont grands, non pas gigantesques, ils s'émeuvent, ils souffrent,
mais ils se domptent (Auguste, Pauline).
Ils sont sublimes, non boursouflés (le Cid, Polyeucte), vivants, non
chimériques; ils discutent avec eux-mêmes, ils luttent et si la victoire est certaine, s'ils savent rester maîtres d'euxmêmes, c'est qu'ils en prennent les moyens (Pauline dans Polyeucte, Acte I, sc.
4 et II, 2).
III.
L'exemple de leurs vices peut-il être contagieux ?
Racine l'a cru et c'est pourquoi il s'est retiré du théâtre.
Et il est bien certain que son art prestigieux nous rend
sympathiques des personnages dont nous aurions horreur dans la réalité (Phèdre, Hermione).
Mais cela ne veut pas
dire que nous soyons tentés de les imiter.
Ce n'est pas lui qui divinise la passion.
Il la donne pour ce qu'elle est, une
faiblesse et quelquefois une folie et il nous en montre les funestes conséquences (les tueries de ses dénouements).
IV.
L'exemple de leurs vertus peut-il être utile ?
Incontestablement, Corneille élève, étonne, instruit.
Rousseau se trompe donc.
C'est qu'il y a deux choses dans la tragédie: la forme, le cadre, magnifique, mais un peu
archaïque et conventionnel, - et le fond, les situations et les sentiments, réalité humaine, vivante, d'un intérêt
toujours actuel et d'une portée éternelle..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- François Mauriac écrit dans son journal intime : «J'ai pris le journalisme au sérieux. C'est pour moi le seul genre auquel convienne l'expression de littérature engagée. » Partagez-vous cette conviction du romancier ou, d'après vous, la « littérature engagée » peut-elle revêtir d'autres formes ? Vous appuierez vos réflexions sur des exemples précis.
- Questions sur Phèdre : 1) Décrivez la passion racinienne du personnage (Phèdre) en s'appuyant sur des exemples précis et personnels. 2) De quelle manière le conflit racinien s'exprime t-il ? 3) Phèdre, une héroïne mythique. Montrez-le. Pourquoi ce choix ? 4) En s'appuyant sur une de vos lectures personnelles de Corneille, différenciez le tragique de Corneille à celui de Racine (exemple précis et personnels) 5) Imaginez par écrit une mise en scène moderne de Phèdre.
- « J'ai l'optimisme de croire qu'on a enfin compris dans les autres sphères de l'Enseignement que plus un auteur est proche de l'enfant dans le temps, plus il a de chance de l'intéresser et de l'enrichir. Toute éducation littéraire doit commencer par les contemporains » écrit Michel Tournier dans Le Vent Paradet (1977). Partagez-vous cette opinion? Vous illustrerez votre pensée par des exemples précis tirés de vos lectures.
- Montrez comment, dans la Contreverse de Valladolid, J.-C. Carrière, à travers une intrigue qui se situe au XVIe siècle, amène le lecteur à une réflexion à la fois actuelle et intemporelle. Vous appuierez votre argumentation sur des exemples précis, tirés à la fois de la Contreverse et d'autres documents (livres ou films).
- On a généralement tendance à ne voir l'intrigue politique dans une pièce de Racine que comme un a adjuvant à l'intrigue amoureuse. Elle serait donc extrêmement seconde écrit le critique Alain Quesnel. En vous appuyant sur des exemples précis empruntés à Britannicus, vous montrerez que ce critique a raison de soutenir que le pouvoir politique joue cependant un rôle majeur dans l'économie d'une tragédie racinienne. ?