Valéry, Préface au catalogue d'une exposition de l'Art italien
Extrait du document
«
RÉSUMÉ
Le monde moderne a imposé à l'art l'idéal de la nouveauté, qui s'est substitué au jugement de la postérité.
La
publicité a remplacé le petit nombre de connaisseurs incorruptibles dont le goût avait jadis force de loi : à Athènes,
Florence ou Amsterdam ces groupes favorisaient la création artistique.
L'unité de but manque désormais aux artistes
; divisés contre eux-mêmes, ils ont sans cesse besoin de systèmes éphémères.
Il ne s'agit pourtant pas pour eux
d'imiter leurs glorieux prédécesseurs : mais ceux-là étaient hommes complets ; ils ne travaillaient pas pour choquer
par la nouveauté mais pour rappeler à eux le public des siècles à venir.
ANALYSE
Paul Valéry dénonce en premier lieu les buts que le monde moderne a donnés à l'art : il lui a imposé l'idéal de la
nouveauté qui s'est substitué au jugement de la postérité.
Les conditions même d'élaboration de l'oeuvre d'art se sont fâcheusement modifiées : la publicité a remplacé le petit
nombre de connaisseurs incorruptibles dont le goût avait jadis force de loi : à Athènes, Florence ou Amsterdam ces
groupes favorisaient la création artistique.
Mais le mal ne provient pas seulement des conditions extérieures : les
artistes eux-mêmes sont atteints ; ils manquent d'une unité de but, et, divisés contre eux-mêmes, ils ont sans
cesse besoin de systèmes éphémères.
Est-ce à dire qu'il faille imiter les artistes du passé ? Valéry ne va pas jusquelà mais affirme que leurs méthodes et leur but doivent inspirer leurs successeurs ; ils étaient hommes complets, et
ne travaillaient pas pour choquer par la nouveauté mais pour rappeler à eux le public des siècles à venir.
( On développera ce que nous indiquons ici.
sous la forme d'un PLAN DÉTAILLÉ.)
Dans ce texte le commentaire et, éventuellement, la discussion doivent s'orienter vers la définition, selon Valéry,
des facteurs de la création artistique.
I.
- LES FACTEURS EXTÉRIEURS
Valéry distingue une première série de facteurs extérieurs à la création artistique, et pour cela, il oppose aux
procédés de la publicité le public de connaisseurs qui, selon lui, jugeait autrefois les oeuvres d'art.
En fait, la
publicité est devenue un moyen de diffusion approprié au vaste public que le progrès technique a conquis, mais celui
d'Athènes, de Florence ou d'Amsterdam « consommait » l'art tout autant que le font nos contemporains.
Certes ce
public-là eut ses connaisseurs, mais nous avons les nôtres : de brillants groupes littéraires, de fécondes écoles
picturales savent aujourd'hui encore transcender la pression immédiate du marché afin d'exprimer les virtualités de
notre existence.
II.
- LES FACTEURS INTERNES
Le mal que dénonce Valéry réside-t-il vraiment au coeur même de l'artiste ? Celui-ci, nous dit-il, est divisé contre
lui-même.
Et comment pourrait-il en être autrement dans notre monde ? L'artiste assume la dialectique
fondamentale de toute activité humaine ; il crée et se voit créant, tente de justifier son dessein, de le réorienter,
de comprendre sa fonction dans notre société.
Valéry semble faire ici le procès de.
la conscience et de la lucidité.
III.
- LE RENOUVELLEMENT CONTINU DES FORMES D'ART
Il est vrai qu'il assigne pour but suprême à l'art le souci de durer.
Que signifie tout cela désormais ? La plus grande
partie du public, la plus spontanée, se désintéresse presque totalement de l'art passé ; lorsqu'elle en est émue,
c'est pour des raisons que les artistes de jadis ne pouvaient nullement pressentir.
Et il est vrai que certaines
oeuvres riches admettent une pluralité de significations.
Mais c'est le présent qui doit nous intéresser et la création
artistique qui relève de l'imaginaire se doit de chercher sans cesse des formes nouvelles pour donner à l'humanité
l'image même de son évolution permanente et la conscience de son inachèvement..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Théophile Gautier écrit en 1834 dans la préface de Mademoiselle de Maupin : « Il n'y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid ». Vous réagissez à cette citation dans un article destiné au courrier des lecteurs de votre journal habituel. Votre réflexion portera sur la poésie et non sur l'art en général.
- « Le roman cherche l'Art et la Vérité ainsi que la Souffrance humaine », remarquent les frères Goncourt dans leur préface de Germinie Lacerteux (1865). Cette vision sociale du roman naturaliste vous paraît-elle correspondre au roman de l'Assommoir de Zola ?
- Paul Valéry donne aux écrivains ce conseil: Entre deux mots il faut choisir le moindre. Vous rapprocherez cette boutade de la définition qu'André Gide propose du classicisme: C'est l'art de la litote. Vous vous demanderez quel aspect du classicisme et, d'une façon générale, quelles positions littéraires sont ainsi définis ?
- Imaginez le manifeste ou la préface qu'un poète partisan de l'art pour l'art pourrait placer en tête de recueil de poésies volontairement non engagées. Vous veillerez à ce qu'il appuie son intervention sur des exemples précis.
- Après avoir écrit : « Au même Baudelaire appartient une autre initiative. Le premier parmi nos poètes, il subit, il invoque, il interroge la Musique... », Paul Valéry affirme : « Ce qui fut baptisé : le Symbolisme, se résume très simplement dans l'intention commune à plusieurs familles de poètes (d'ailleurs ennemies entre elles) de reprendre à la Musique leur bien. » (Variété I, Avant-propos à « La connaissance de la Déesse », pp. 95 et 97. Valéry pense à la phrase où Mallarmé parle d'