Vie et oeuvre de Mme DE STAEL
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«
Mme DE STAEL
Née à Paris, GERMAINE NECKER, fille du ministre de Louis XVI, se rattache par ses origines à la Suisse calviniste.
Dans le salon de sa
mère, elle voit passer toutes les célébrités de l'époque et, parmi les écrivains, Grimm, l'abbé Raynal, La Harpe, Buffon.
A vingt ans,
elle épouse Erik-Magnus DE STAEL-HOLSTEIN, ambassadeur de Suède.
Ce mariage lui apporte, à défaut du bonheur, la possibilité de
jouer un rôle.
Elle s'enthousiasme pour la Révolution.
Mais elle ne tarde pas à déchanter.
Après les massacres de septembre 1792, elle
se réfugie chez son père, au château de Coppet, sur les bords du lac de Genève.
Elle rentre en France en 1795.
Sous le Directoire,
nouvel exil qui dure jusqu'en 1797.
Bonaparte, qui la considère comme une intrigante dangereuse, lui impose en 1803 l'obligation de
résider à quarante lieues de Paris, l'en éloigne dès qu'elle tente d'y revenir et déchaîne contre ses ouvrages les rigueurs de la critique
officielle.
Tout en gardant comme point d'attache le château de Coppet, elle parcourt l'Europe : Autriche, Russie, Suède, Angleterre et
surtout Allemagne et Italie.
Elle entretient avec Benjamin Constant, dont elle a fait la connaissance en 1794, une longue et orageuse
liaison.
Veuve du baron de Staël depuis 1802, elle se remarie en 1811 avec un jeune officier suisse, Albert de Rocca.
Sous la
Restauration, elle rouvre son salon parisien.
En 1817, elle est frappée de paralysie au cours d'un bal chez le duc Decazes.
Elle meurt
peu après.
« Ce qui retient de s'attendrir sur Mme de Staël, a-t-on dit, c'est l'agitation dont elle s'écrase elle-même.» Elle est exaspérante par sa
volonté de tout régenter, par les exigences de son amitié ou de son amour.
PRINCIPALES OEUVRES
De l'influence des passions sur le bonheur des individus et des nations (1796).
De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (1800).
I.
(De la littérature chez les anciens et les modernes).
La littérature dépend des institutions, des moeurs, des événements politiques et
sociaux, du climat.
L'opposition entre la poésie du Midi et celle du Nord, représentées l'une par Homère, l'autre par Ossian, s'explique essentiellement par la différence des climats.
II.
(De l'état actuel des lumières en France et de leurs progrès futurs.) Aux temps nouveaux doit correspondre une littérature
affranchie de l'imitation des anciens, tournée vers la philosophie et vers l'expression éloquente des aspirations de l'homme moderne.
La loi du progrès veut que cette littérature soit supérieure à toutes celles des siècles passés.
Delphine (1802) : roman par lettres.
Léonce aime Delphine, mais il est séparé d'elle d'abord par des f soupçons injustes, ensuite par des préjugés.
Sa mort entraîne par
contre-coup celle de Delphine.
Corinne ou l'Italie (1807) : roman.
Au cours d'un voyage en Italie, lord Oswald Nelvil rencontre la poétesse Corinne.
Ils s'éprennent l'un de l'autre.
De retour dans son
pays, Oswald retombe sous l'influence du conformisme anglais.
Les audaces et le génie de Corinne l'effraient.
Il épouse une autre
femme moins brillante.
Corinne meurt de cet abandon.
De l'Allemagne.
Ce livre imprimé en 1810, mais saisi et détruit par ordre de Napoléon, parut seulement en 1813 à Londres et en
1814 à Paris.
I.
(De l'Allemagne et des moeurs des Allemands.) Les Allemands sont idéalistes, sentimentaux, artistes.
Leur sérieux fait contraste
avec le tempérament spirituel et léger des Français.
— II.
(De la littérature et des arts.) Présentation de quelques grands écrivains
allemands : -Wieland, Klopstock, Lessing, Goethe, Schiller.
La poésie, le drame, la comédie, le roman, l'histoire, les beaux-arts.
— III.
(La philosophie et la morale.) Les Allemands ont plus de goût pour la philosophie spéculative que pour la philosophie expérimentale.
La
pensée de Kant.
Influence de la nouvelle philosophie allemande sur la littérature, les arts, les sciences, les moeurs.
— IV.
(La religion
et l'enthousiasme.) Les Allemands sont portés à la « mysticité » et à l'enthousiasme.
Éloge de l'enthousiasme.
A L'AVANT-GARDE DU ROMANTISME
Dès son premier grand ouvrage, Mme de Staël affirme avec force la nécessité de créer une littérature appropriée aux temps
nouveaux.
Elle fonde son argumentation sur la perfectibilité indéfinie de l'esprit humain., force irrésistible qu'il convient de diriger.
Elle
reconnaît la supériorité des modernes sur les anciens, prétend en trouver la preuve dans l'histoire et fait dépendre le « progrès des
lumières » de la liberté politique.
Ces idées ne tarderont pas à faire leur chemin, et de la notion de liberté politique sortira celle de
liberté dans l'art.
Reprenant la théorie de Montesquieu sur la relativité des lois des coutumes, Mme de Staël démontre que, chez les modernes, la
littérature des anciens est une « littérature transplantée », tandis que la poésie « née de la chevalerie et du christianisme » a « ses
racines dans notre propre sol » et, de ce fait, « peut croître et se vivifier à nouveau ».
Dans cette poésie, qu'elle appelle romantique,
elle discerne déjà.
le sentiment douloureux de l'incomplet de notre destinée.
Elle suggère l'imitation des écrivains « du Nord », vers lesquels, par une sorte d'atavisme, elle est davantage attirée.
Elle a lancé la
légende d'une Allemagne sentimentale et candide.
Son large cosmopolitisme fait place également aux influences italiennes.
Il faut, ditelle, avoir « l'esprit européen ».
Elle est de tempérament passionné.
Elle cherche le bonheur dans des amours tumultueuses.
Elle fait grand cas de l'enthousiasme.
Elle
apprécie le charme de la mélancolie.
Mais elle est peu accessible au sentiment de la nature.
D'autre part, s'il est vrai que sa
connaissance de l'Allemagne l'a familiarisée avec le mysticisme, elle manque de dispositions religieuses.
Ses romans content l'histoire de femmes supérieures et incomprises, qui finissent par mourir de douleur et d'amour.
Ils présentent la
femme comme la victime de contraintes sociales, qui l'empêchent d'affirmer sa personnalité et qui lui ôtent la possibilité du bonheur.
Ils ne réclament pas pour elle l'égalité avec l'homme, mais seulement le droit d'aimer : revendication que bientôt George Sand fera
sienne.
Même lorsqu'elle ne paraît soucieuse que de démontrer, Mme de Staël cède à 'l'entraînement de son coeur plutôt qu'à la raison.
Dans
ses traités De la littérature, De l'Allemagne, l'enthousiasme est visible, bien qu'il soit souvent trahi par un style trop abstrait.
« Je ne
puis séparer mes idées de mes sentiments », disait-elle..
»
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